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Brigitte Giraud

samedi 14 décembre 2013, par Cécile Guivarch

Extraits de Le trajet d’une voix

Dans la baraque, il y a un peu de lumière et c’est la fin du jour.
« On sauve quelque chose d’une âme ».
Le soleil se colle au plafond.
Tu fais le geste d’éteindre la lampe.
Et la lampe est un geste.



On finira bien par s’accrocher
à une branche, à une mousse,
par déplier le jour
qui vient
à blanc.
Un drôle de dépli, ce sera.
Dans un champ aux mélanges de la nuit d’or,
parfums et sucs en écorces d’agrumes,
les pelures de la mémoire sous la table.



Parfois la distance se réduit
à si peu
à presque rien
entre la réalité
et le miroir.
La métaphore est épuisée.
On a lissé la mer.



L’écho d’une écriture battante,
la graphie d’un tambour,
et la vie merveilleusement têtue.
On croit à une échelle de corde adossée au monde.

On poursuit quelque chose de soi- même dans le regard de l’autre.



On s’étonne d’une fulgurante cascade de baisers,
dans la nuit en tumulte de pluie plantée dans la pulpe des doigts,
au vent des amers volés, cramèche !
aux paupières cassées des mots en gré,
aux arbres de soies grises,
aux gerçures « ça va bien comme toujours »,
au coin de la rue, le chassé/croisé, l’embellie dans une fontaine chassée, plouf !
à l’imprévue de la bifurcation des atomes,
pour la fumée en tête de gondoles,
le surplis aux fenêtres, un collage de cailloux,
le bras du fleuve agrandi, on dirait,
et les coups de heurtoir d’une voix.

Qu’en moi ta voix s’implante !



Suivre quelque chose de soi-
même avec des fruits rouges
quelque chose de nous
on ne sait pas
quoi
penser à
quoi se laver les yeux de l’inquiétude
un temps de solitude à la pluie du trottoir.



On regarde autour de soi.
On s’aperçoit que autour nous garde.


Mini entretien avec Cécile Guivarch

D’où vient l’écriture pour toi ?

Je ne sais pas nommer le lieu d’où elle vient. D’une façon simple, l’amour des mots berce ma vie depuis longtemps. Je me revois petite fille glissant des lettres sous l’oreiller de ma mère pour lui dire... Pour moi, il a toujours fallu que les grandes émotions passent par l’écriture et que ce mystère laisse échapper, goutte à goutte ou mot à mot, une voix de l’intérieur, ce clapotis du dedans. Je n’aime pas « la triche ». L’écriture n’est jamais un médicament, elle est un appui où s’adosser. Je crois que chacun traîne sa part d’ombre, une sorte de revers de médaille, et cherche sa manière de vivre avec tout ça. Pour moi, l’écriture est une sorte d’invention dans ce qui est de vivre. Parce que ça va avec la vie, qu’elle avance avec la vie, et que la vie nous rend parfois sans paroles et muet. On ne traverse pas un océan sans se mouiller les pieds. Et j’aime bien ramasser des petits cailloux que je garde comme une violence de l’existence, ou c’est pareil, une violence de sa beauté. Ecrire, c’est s’engager dans l’humain. Pour moi, aucune prétention dans cette affirmation.

Comment travailles-tu tes écrits ?

J’écris souvent dans des calepins, mais pas toujours. L’ordinateur a aussi sa page blanche. Je me relis à voix haute. Quand « ça » supporte la lecture, ou quand moi je la supporte, je me dis qu’il y a peut-être quelque chose d’atteint. J’aime bien le soir et le silence pour m’accompagner. La lecture de ce que j’écris par mon compagnon, mon toujours premier lecteur, m’est précieuse.

Quelle est ta bibliothèque idéale ?

Je citerai quand même Duras, et Thierry Metz. Mais ma bibliothèque, c’est des auteurs, des poètes, des philosophes, des peintres, des photographes, des musiciens. Eux qui témoignent de la vie et de la création qu’elle porte depuis toujours. Donc elle est évolutive et en découverte.


Brigitte Giraud travaille régulièrement avec des plasticiens à la relation texte/image pour des affiches poétiques. Elle a participé en septembre 2006 à la Nuit du patrimoine et à Open Doors/Open Eyes, Novart 2006.

Brigitte Giraud a participé au Printemps des Poètes 2010 et 2011, au Festival Nomades 2010, aux Pique-Nique littéraires de la bibliothèque de Bordeaux, aux manifestations culturelles d’Eysines, au Marché de la Poésie de Bordeaux, aux Escales du Livre...
Elle fait des vidéos créatrices, et a participé au film sur le philosophe Robert Misrahi.

Romans, poésie :

  • L’Éternité bien sûr, son premier roman, 1999, est une quête de l’amour absolu aux confins du rêve et de la réalité.
  • Des ortolans et puis rien, 2005, publié par les éditions Pleine Page. On est à la fois dans le récit, le journal et la poésie. Ce texte sur la mort du père a été mis en voix par le Théâtre des Tafurs dans le cadre de Novart 2005.
  • La Nuit se sauve par la fenêtre, éditions Pleine Page, 2007, a obtenu le prix Jean-Follain.
  • Le désespoir amoureux de la vie, l’anorexie un mystère galvaudé, éditions Le Bord de L’eau, 2009, pose un regard et une réflexion sur un trouble douloureux. Avant-propos du Pr Claire Series et préface du Pr Gérard Ostermann.
  • Seulement la vie, tu sais, éditions Rafael de Surtis, 2012, est un parcours urbain, dans Bordeaux, traversé de mouvements, de déplacements et de trajectoires amoureuses.

Ouvrages collectifs :

  • La Mémoire contre la nuit, éditions du Passant, 1997
  • Villes au bord du monde, éditions Le Jardin d’essai, 2000
  • L’instituteur , éditions Delphine Montalant, 2007

Théâtre :

  • L’avenir dure longtemps, 2010, elle crée la dramaturgie d’un spectacle théâtral avec le théâtre des Tafurs dont elle est présidente. Ce spectacle a été produit au Globe Théâtre, ainsi qu’ à la Maison Cantonale de Bordeaux-Bastide.
  • Pourquoi tu ne tournes plus ?, 2012, est mise en scène par la Compagnie du Petit Rien.

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