Diane Régimbald vit à Montréal. Elle a publié plusieurs recueils de poésie aux éditions du Noroît, dont le plus récent, L’insensée rayonne en coédition avec L’Arbre à Paroles (2012) a été en nomination au Prix de poésie du Gouverneur général du Canada. Elle a collaboré à diverses revues et participé à plusieurs événements et lectures publiques au Québec, en Amérique latine et en Europe. Elle a été auteure en résidence en 2006, à Amsterdam et, en 2010, à la Maison de la poésie d’Amay, en Belgique. Certains de ces textes ont été traduits en anglais, en catalan et en espagnol.
(Crédit photo : Dominique Malaterre)
Extraits de La seconde venue
Le bruissement des voix bouscule l’intimité pour aller vers une immensité voilée. La mer étale devine le désert. Elle le rejoint.
Le brouillard se tient endigué au port de genèse.*
Je vois cette terre intérieure où les eaux sont torrents. On entend les sons d’une mélodie à peine traversée par la voix, une musique sans rivages où on n’accoste jamais.
Elle navigue sans port d’attache et ne revendique rien, est seulement héritière de son étrangeté. Elle est ma petite fille aux cheveux noirs. Souverainement libre, elle est le personnage de mes fuites en avant, l’Indienne de mon nom emporté.
Extraits de Pierres de passages
Des cœurs battent dans le ventre de la mère
au creux liquide.Tu prends chair
jusqu’à te rompre au devenir du monde.Tu fais le passage à la lumière
et prends connaissance de l’ombre.*
Chaque être naît d’une demeure
mère du ciel traversé
de la cosmogonie humaine.
Une naissance s’ouvre à la vieau sang pulsé en nos veines.
Je suis née de ce qui façonne la terre
morceaux d’os
de muscles et de sang.
Embryon d’un monde accompli
par l’acte d’amour
portant au pied du jour
sur la traverse du fleuve innommé
le nom de passage.*
On recueille une voix, un chant
un visage portant les traces de ses origines
un corps que l’on vêtira
d’un nom de pierres.Déchirure du centre
du corps qui s’ouvre au nom perdu
de la mémoire des eaux.
L’ardoise en bouche
des fureurs dorment sous les algues.
Extraits de Des cendres des corps
Je t’ai donné ma main, ce geste
sur ta tête aimante. Lointaine traversée
avec toi perdu, ne sachant plus l’amour
croyant trouver ta liberté dans un ailleurs d’homme.Le vent tourne, se donnant à tes désirs
la nuit s’évade de ta bouche
vapeurs épaisses comme halo
de noirceur qui divague.La musique s’effrite sur les pierres sèches.
Nous n’avons jamais su comment tourner les pages.
Extraits de Pas
le pas dans le corps
au mieux serait amouramorce d’un geste de la main
signe attendu
lien appelé du cielet la nuit les étoiles
à la table des rêves
mouvement brusque du pied
de la jambe
muté par une voix*
les corps entremêlés par les sables
rien ne vaut leurs rives
où se crée le tempsle poème fera le livre
sur la vie et sur la mort
au plus près de leur beauté de leur cruautéla vie ne la vois-tu pas
faire son chemin dans tes veines ?*
tu mangeais tes paroles tu mangeais
il n’y avait que ventta bouche ouverte à l’embouquement
tu régurgitais les rues les villes
les fleuves dominaient tes chimèreston chant courait sur le réseau des cafés
mais tu volais ainsi tu volais
voilà ! fin d’une histoire
fin d’un amour sans circuit
fin d’une époquela danse revient toujours ainsi
au chant des heurts
au vol des ailes brisées*
nous déambulons
sur la ligne de l’horizon
aux possibles absolusle pas chavire
jusqu’à perdre pied
pousséje suis revenue
creuser
Extraits de L’insensée rayonne
il restera une clairière vide
un corps étendu dans le coin
gauche à l’orée du bois
sans vie qui rayonne
une fine lumière rosée
sur le corps de la morte prendra
toutce sera la morte rêvée
la morte en moi
la descendante
Bibliographie
Livres
- La seconde venue ; tableaux de Kamila Wozniakowska, (poésie), Montréal, Éditions du Noroît, coll. Initiale, 1993.
- Pierres de passage (poésie), Montréal, Éditions du Noroît, 2003.
- Des cendres des corps (poésie), Montréal, Éditions du Noroît, 2007.
- Pas (poésie), Montréal, Éditions du Noroît, 2009.
- L’insensée rayonne (poésie), coédition : Éditions du Noroît, collection Résonances, Montréal, 2012/ L’Arbre à paroles, collection Résidences, Amay, Belgique, 2013.
Plaquettes en traduction (en catalan et en espagnol)
- Langue et poésie : résistance (essai traduit en catalan), plaquette publiée hors commerce, Barcelone, 2007.
- Raga (demanant una pluja), traduit en catalan par Nathalie Bittoun et Josep Maria Sala-Valldaura, dessins de Esther Sala, plaquette en édition bilingue, SENHA, no 114, Llibreria 22 et Ajuntament de Girona, Espagne, 2009 (12 pages) 200 exemplaires numérotés.
- Passeres / Pierres de passage (extraits), traduit du catalan par Antoni Clapés, Els ulls de Tirèsies, no 37, Éditions Cafè Central, Barcelone, 2009 (non numéroté)
- Cenizas de los cuerpos, Pasos (extractos), traduit de l’espagnol par Silvia Pratt, plaquette publiée à l’occasion de la Encuentro de poetas del mundo latino, édition bilingue, avec la complicité des Éditions du Noroît, 2009 (58 pages).
Livre d’artistes
- Déjouer, concepteur : Jacques Fournier, artiste visuelle : Marie-Claude Bouthillier, auteures : Martine Audet, Louise Cotnoir, Denise Desautels, Louise Dupré, Diane Régimbald, Élise Turcotte, Éditions Roselin, 2013.
Ouvrages collectifs
- Mouvance… de la rivière au fleuve, sous la direction de Jean-Paul Daoust, Éditions Création Bell’Arte, champs-vallons, Sainte-Mélanie, 2005
- Finestres obertes / Fenêtres ouvertes (avec Josep Maria Sala-Valldaura , Anna Montero, Jean-Paul Daoust), Anada i tornada 1, Emboscall Editorial, Alliance Française et Cafè Central, Vic, Barcelona, 2007. En français et en catalan.
- Poetas del mundo latino, Universitad Intercontinental, Mexico, octobre 2009.
- Pas d’ici, pas d’ailleurs, anthologie poétique francophone de voix féminines contemporaines (sous la direction de Sabine Huynh, Andrée Lacelle, Angèle Paoli et Aurélie Tourniaire), Éditions Voix d’encre, Paris, 2012.
Sur Internet
Sur les sites : Radio Spirale radiospirale.org/ ? - L’Île, Infocentre littéraire des écrivains québécois www.litterature.org/