(Photo Antoine LnP)
Parfois les mots tombent de la bouche du poète
Sans l’ombre ni même l’idée d’un faux pli
Quant à nous pauvres pêcheurs
Il nous faut bien survivre
Avec nos phrases bancales
Et des cartons de bière
Pour les tenir debout
Jeu de société (2)
Quand il l’aime sur le tapis aux ramures neigeuses
Elle évite le regard de l’enfant mort
Les desseins de sa mère sur l’environ de tous les murs
Epinglée dans la barbe bleue de l’oubli
Elle s’en remet à la lumière d’un avenir cristallin
Tenu par un cheveu offert lors d’une précédente visite
Gardant avec précaution dans une poche de sa veste
Le formulaire des destinations éphémères
Jeux de dupes
Tu tombes le masque
Petite imprudente, tu ne devrais pas à moi te frotter
Je retire le mien
Petite ignorante, c’est toi qu’il protégeait
Piboule
Chaque chose à sa place et en son temps
les pendules à l’heure
les vaches sacréesSur les peupliers argentés du petit matin
Effleuré par les premiers rayons du soleil
Un écureuil gracieux danse un pogo du diable
Bibliothèque
Mes amis les poètes ont
L’air ahuri
De magnifiques échappées
Une bonne descente
En généralMes amis les poètes ont
Une extravagance collée à leurs semelles
Des dessous de table affriolants
Des chants de désespoir
Qui
Curieusement
Nourrissent équilibré
Elle ne pleure pas
Presque plus du tout
Sauf pour cela
Cela présence, passée, future
Cela l’absence
La conjugaison des tempsElle n’est pas prête
Elle l’est à tout
Sauf à cela
Cela les mains, la peau, la bouche
Cela le souffle
L’ouverture à cœurElle n’a plus peur
De rien du tout
Sauf de cela
Cela l’autre, l’intime, les secrets
Cela l’amour
Faubourg Saint-Antoine – Paris – France - 2013
Le soleil dans la peau
Maigre
Un bâton à la main
Le bâton frappe le trottoir
Le bâton frappe les poteaux
Le bâton explore les poubelles
Maigre
Le soleil dans la peau
La peau sèche
Le soleil dans la rue
Le soleil fouille la poubelleSi on lui demandait son âge
Elle l’écrirait sur le trottoir
Un cercle
Et un bâton devant
Archange
A R.PTu m’as profondément changé
Il se trompe
Personne ne change personne
C’est juste lui
Qui gagne au change
L’impossible
A MFNe bouge pas
Surtout ne bouge pas
Tu es un miroir
Un reflet
Une surface
Un néant
Sans cœur
Sans passé
Sans espoir
Sans peur
Tu es le silence
Son regard glisse sur toi
Ne bouge pas
Surtout ne bouge pas
Laisse son regard glisser sur toi
Laisse le s’éloigner de toi
Ne bouge pas
Surtout ne bouge pas
N’appelle pas
Ne nomme pas
Ne te souviens pas
N’écris pas
A lui ne pense pas
Il faudra leur parler un jour
Se tenir devant eux
Leur dire
Dans ce monde
Tout le monde blesse tout le monde
Vous constaterez
Plus ou moins
De montants compensatoires
Il faudra leur parler un jour
Face à face
Leur dire
Je suis qui je suis
Je suis debout
Vous êtes bons vivants
Passons à autre chose
Il faudra leur parler un jour
A cœur ouvert
Mains sur la table
Yeux dans les yeux
Et s’ils sortent le flingue
Ne pas faire de quartier
Dans une autre vie je serai
Cette femme au corps parfait
Ferme, souple, harmonieux et suave
Je serai simple et modeste
Comme s’il était le corps de quelqu’un d’autre
Puis je mourrai jeune
Dans une autre vie je serai
une hirondelle
Envers et contre tous
Et si cela me chante
Je ferai le printemps
J’ai pris un PV
pour avoir beurré
tes tartines
au petit déjeuner
ce matin je t’ai acheté des croissants
ne le dis à personne
Mini entretien avec Roselyne Sibille
D’où vient l’écriture pour toi ?
De la lecture. C’est avant tout un prêté pour un rendu. La lecture, la musique, l’art en général, rendent le monde acceptable. J’écris depuis toujours, je ne tiens pas à savoir comment serait ma vie sans cela. Elle est un lieu de ma liberté. Depuis que je publie, elle vient également des lecteurs, eux aussi la nourrissent.
Comment travailles-tu tes écrits ?
En général pour les romans je commence par me mettre d’accord avec moi-même sur ce que je veux partager, ce que j’ai envie de dire ou de raconter. Le premier jet est le plus difficile. Ensuite je retravaille beaucoup pour simplifier, aller à l’essentiel, trouver la façon qui me convient.
Chaque texte a son propre processus et son propre protocole.
Pour les poèmes cela peut partir d’un mot, d’une image, d’une sensation.
Pour tous mes écrits, je laisse souvent reposer avant de travailler à nouveau. Et je compte beaucoup sur ma petite voix, instinctive, qui me tourmente tant que la phrase lui semble bancale.
Que t’apporte l’écriture ?
L’écriture interroge. Soi, le monde, la langue, l’autre. Elle me tient éveillée, me rend vivante. Elle me procure des plaisirs uniques et pour lesquels je n’ai besoin que d’un papier et d’un crayon (d’un ordinateur, soit).
C’est un chemin qui me fait grandir, avec ses joies et ses douleurs comme tous les chemins.
Quelle serait ta bibliothèque idéale ?
La mienne est avant tout éclectique, de Marguerite Duras à Philippe Jaenada, de la littérature américaine, Nord et Sud, japonaise… peu de classiques, je suis plus sensible à ce qui s’écrit ici et maintenant. Il y a aussi des polars, Michel Embareck par exemple, et beaucoup de poésie. Si j’aime Baudelaire ou Rimbaud, j’ai une profonde amitié pour Jacques Prévert et les contemporains me touchent davantage : Frédérick Houdaer, Thomas Vinau, Marlène Tissot, Brigitte Giraud…
Notice biographique
Hélène Dassavray naît au milieu du siècle dernier dans le plus petit département de France. Le bac en poche elle part dans le Sud étudier la vie, le rock’n roll, et l’amour.
Elle s’aventure dans de nombreuses expériences professionnelles : bibliothécaire, libraire, animatrice d’ateliers d’écriture, création et gérance d’un café culturel alternassociatif, administration d’une compagnie de théâtre…
Elle partage son temps entre la campagne du Luberon et Paris.
Son but : travailler au ralentissement du monde.
Elle écrit depuis qu’elle sait le faire, mais en 2000 elle se rend compte que cela peut intéresser des lecteurs. C’est ainsi qu’elle écrira son premier roman Les ruines de la future maison, publié en 2008, un succès du bouche à oreille en cours de réédition. D’autres ouvrages suivront, romans, journal, et recueils de poésie.
Bibliographie
Romans
Les ruines de la future maison
Éditions A plus d’un titre - Collection A charge - 2008
Le dimanche je m’appelle Olivier
Éditions A plus d’un titre - Collection A charge - 2011
Poésie
Des contes et des faits
Éditions Klanba - 2010
Des hauts et des bars
Éditions Hors Cadre – 2011
Les femmes fatales sont-elles mortelles ?
Minicrobe - 2012
C’est gentil d’être passé
Éditions Le pédalo ivre - 2013
Journal
Femme de Lune et de Sagesse, l’intégrale - Éditions Hors Cadre - 2013
Participations
La souris déglinguée - 30 nouvelles lysergiques
Éditions Camion Blanc - 2011
Buk you ! Œuvre collective autour de celle de Charles Bukowski
Éditions Gros Textes - 2013
Assortiments de crudités
Éditions du Cactus inébranlable - 2013
A suivre sur : http://helene.dassavray.over-blog.com/
Photo : Antoine LnP
(Page établie grâce à la complicité de Roselyne Sibille)
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