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L’espère-lurette, chronique po&tique de Jean Palomba (avril 2021)

vendredi 9 avril 2021, par Roselyne Sibille

Yassin al-Haj Saleh : Lettres à Samira, traduit de l’arabe (Syrie) par Souad Labbize, préface de Ziad Majed et postface de Wejdan Nassif, éditions des Lisières, 2021.

« Bien sûr, Jean peut chroniquer ce livre. Je comprends que ce sont des lettres, donc nous savons toutes les deux que des lettres sont de la poésie. », c’est la réponse faite à Roselyne Sibille (poète, membre du comité de rédaction de Terre à Ciel, poésie d’aujourd’hui) par Cécile Guivarch (poète, directrice de publication).

Et c’est l’absolue réalité : ces quinze lettres adressées à Samira, écrites du 9 juillet 2017 au 9 décembre 2019 constituent une œuvre tragique, politique et poétique. Les sept premières paraîtront au fil de l’encre de Yassin al-Haj Saleh dans la presse, elles seront traduites en plusieurs langues et finalement publiés aux Lisières, dix ans après le début de la révolution syrienne, constitutive du Printemps Arabe.

ELLE
"Samira al-Khalil. Une Syrienne éprise de liberté et de justice. Deux valeurs antinomiques avec l’ADN politique de la dynastie assadienne de son pays, qui se nourrit du sang et des larmes de celles et ceux qui ont osé les réclamer. Samira en est une incarnation puisque son activisme au sein de la ligue de l’action communiste lui avait déjà valu sous Hafez el-Assad, plus de quatre années d’incarcération entre 1987 et 1991. En 2011, lorsqu’éclate la révolution syrienne, c’est sans peur et avec beaucoup d’espoir que Samira s’investit avec nombre de militant-e-s qui croyaient que l’heure de la délivrance avaient enfin sonné. En 2013, elle se réfugie dans la Ghouta de Damas, libérée du régime mais assiégée par ses troupes. Avec les compagnons déjà repliés sur place, elle se donne pour mission de documenter le quotidien des gens ordinaires sous le siège. Elle organise alors avec Razan Zaitouneh, avocate et fondatrice du Centre de documentation des violations des droits humains, Wael Hamadé l’époux de cette dernière et le poète et avocat Nazem Hammadi, des actions citoyennes et humanitaires pour résister au siège et à la peur. De sa qualité principale, son ancienne co-détenue et amie Wejdan Nassif dira : « Le soin, c’est ce qui caractérise le mieux Samira. Prendre soin, s’occuper des autres, leur apporter soutien et énergie, c’est ce qu’elle m’a également exprimé, tout au long de notre histoire d’amitié et de camaraderie. Samira est la dame des petits détails qui rendent la vie supportable. »

Nadia Leila Aissaoui, l’Orient Le Jour, le 04 mars 2021

LUI
« Yassin Al-Haj Saleh, 60 ans, est l’un des plus grands intellectuels syriens de sa génération. Homme engagé – son militantisme communiste lui vaut seize ans de prison (1980-1996) sous la dictature d’Hafez Al-Assad –, il prend fait et cause pour la révolution dès mars 2011. Il entre alors dans la clandestinité. En décembre 2013, son épouse, Samira Khalil, est enlevée avec l’avocate des droits de l’homme Razan Zaitouneh et deux autres activistes, probablement par un groupe islamiste [Jaych el-Islam], à Douma, dans les faubourgs de Damas, alors sous contrôle de la rébellion. Au même moment, deux de ses frères sont kidnappés à Rakka, leur ville natale, par l’organisation Etat islamique (EI). L’un d’eux est toujours porté disparu. Yassin Al-Haj Saleh s’exile en Turquie en 2014, puis rejoint l’Allemagne en 2017, où il intègre l’Institut d’études appliquées de Berlin. En France, certains de ses écrits ont fait l’objet d’un recueil, La Question syrienne (Actes Sud, 2016). »

Six Syrie

« La seule Syrie indépendante est celle que forme la diaspora, qui se bat pour vivre et exister politiquement » (Yassin al-Haj Saleh)

Syrie 6 : diasporique, déterritorialisée, mais plurielle et indépendante du régime dynastique et génocidaire qui dirige le pays depuis cinquante et un ans. Cette Syrie-là se bat pour vivre et avoir une existence politique.
Syrie 1 : le protectorat russo-iranien de Bachar Al-Assad.
Syrie 2 : le protectorat de la branche syrienne du PKK (parti kurde armé sécessionniste, interdit en Turquie) sous protection américaine
Syrie 3 : le protectorat turc, dans le Nord et le Nord-Est
Syrie 4 : la poche d’Idlib, où une branche d’Al-Qaida essaie de se normaliser
Syrie 5 : la région occupée par Israël depuis 1967 (le Golan),
et le ciel syrien, que se partagent le protecteur russe du régime et l’agresseur israélien qui cible l’Iran et ses affidés chiites.

D’après Christophe Ayad : "Yassin Al-Haj Saleh : « Nous, Syriens, frappons à la porte de l’Occident, mais personne ne nous répond » (Le Monde, le 12 mars 2021)

Yassin Al-Haj Saleh envoie donc, depuis la sixième Syrie, ses 15 lettres à sa femme disparue. C’est une adresse multipliée à l’Absente - Samira qu’il appelle Sammour, son Amour. C’est son portrait qu’il parvient à réaliser puis transmettre à force d’invocations précises, sobres, nuancées, tendres et tellement précieuses. C’est aussi le chant de leur lutte commune pour la liberté et le respect des droits humains qu’il fait entendre au gré d’une correspondance aveugle, lui, Yassin, en courriériste doté d’un sixième sens : le sentiment extraordinaire qu’il nourrit à l’endroit de l’aimée. Mais c’est également un état des lieux de la Syrie qu’il dresse - leur pays ravagé par la dictature et les luttes fratricides, disloqué par les puissances étrangères, exposé au regard indifférent de l’Occident.

Il y a un ton simple et pourtant teinté d’épopée élégiaque dans ces lettres de Yassin - dû à cette adresse toujours renouvelée : « Sammour », « Lorsque tu reviendras », maintes fois suivie de « toi, Razan, Wael et Nassem ».
Ecrire à Samira, prévoir son retour, c’est pour Yassin, survivre, réfléchir, témoigner, analyser et garder vif l’amour de sa vie et de la vie en lui. C’est dans le même temps, travailler à la cause syrienne et informer l’Absente et la lectrice / le lecteur de l’état du pays, de la lutte, l’état du monde et l’état du scripteur, des lieux où il réside, exilé. Les quartiers et les rues stambouliotes.

Un comparatif Attatûrk / Hafez augmenté d’un portrait d’Istambul nous sont donnés, avec une attention particulière portée aux musiciens de rue, et parmi eux, les musiciens expatriés syriens. Plus généralement, l’importance majeure des arts dans les affaires humaines ne manque jamais d’être soulignée par Yassin : mots, images et mélodies.

Au cours de la correspondance, l’absence de Sammour devient la cause et la cause politique de Yassin. Il va alors faire entendre les voix en lui profondes qui révèlent le réel, disent le juste et l’aident à combattre le silence de l’Absence, de toutes les absences. Il parvient à tracer la biographie de Samira, « la bonne compagne », aussi leur vie ensemble, leur quotidien de labeurs et de voyages, leurs repas, le café partagé,... avec une délicatesse qui n’a d’égale que sa pudeur. Samira par sa voix et son regard miraculeusement paraît : chaleureuse, entière, franche, généreuse et cependant attentive, forte et fragile - comme le mot « lueur » et la réalité qu’il désigne : dernière et formidable luciole devant l’obscurité.
(Apparition illustrée par la photo de couverture - image surexposée de Samira, yeux grand ouverts, pommettes saillantes, brasillement de son regard et de sa cigarette malgré la saturation d’encre noire).
Mais leur vie, c’est aussi la prison. Et cet envoi de lettres vers l’aimée néantisée draine des souvenirs anciens d’incarcération, aussi terriblement actuels. Où l’on comprend que l’existence dans la compagnie d’une disparue emprisonnée s’apparente à celle d’un prisonnier comptant les jours - décompte signalant le temps égrené de la disparition.

Yassin n’évite pas la question de la juste sanction à trouver pour les tortionnaires et leur chef de meute, Assad fils qu’il visualise en poussin déplumé. Un tyran ophtalmologiste de formation, ironiquement voué à soigner l’affection des yeux.

Un message positif est incroyablement transmis : à la faveur d’âpres expériences vécues par deux êtres libres dont les histoires se marient, grâce au désir de changements personnels, à cause du besoin impérieux d’un changement commun : celui du réel atroce en une juste réalité à partager - l’espoir en une communauté humaine libératrice est entrevu.
La liste des alliés et des amies est alors faite et l’on saisit qu’une ode au féminin s’écrit. Les noms des traductrices, l’évocation des mères et des femmes, la révélation de la part féminine à aimer en lui, Yassin, mari de Samira, et comme par l’ineffable intercession d’icelle..., sont progressivement sous sa plume lisibles.
La force et la qualité du pouvoir des larmes sont portés à la connaissance du lecteur et l’expérience lacrimale récemment vécue par l’épistolier l’amène à une conclusion : le champ éditorial est carencé en « littérature de la disparition ». Quid d’une littérature des mères exposées au deuil impossible de leurs disparus ? A quand la transmission de leurs larmes lavant le visage des pages à écrire, « ces mots alternatifs » des mères aux langues coupées ?

Les mères et les traductrices auxquelles il rend hommage, « elles portent », écrit-il, « le drapeau tombé sur le champ de bataille ». L’on se prend alors à imaginer qu’elles brandissent l’oriflamme trouée de la force révolutionnaire en ravaudant sa flamme de toutes ces lettres qu’elles cousent entre elles en plusieurs langues après qu’elles sont sorties des doigts de Yassin, époux de Samira. Langues-fanions coupées et revitalisées au fil de la parole d’amour écrite, transmise, essaimée, portée au regard du monde. C’est là toute la dimension épique de ce texte décliné en 15 missives : 15 lettres d’amour de l’humanité contre la barbarie.

L’histoire de Samira et Yassin devient mythologique, le mythe d’Eurydice et d’Orphée non plus grec mais syrien et bien sûr, universel. L’écrivain dissident épistolier sonde l’abîme de l’Absence à la recherche de son Amour invisibilisé dans la géhenne du rapt et de la disparition. Comme il ne peut la retrouver physiquement, il ne risque pas de se retourner vers elle et la perdre à jamais. C’est pourquoi il regarde dans la même direction qu’elle, vers un avenir juste, celui de « la vie comme la vie », (et non comme l’enfer), une cause présente et à venir qu’ils ont en commun, celle des justes et des droits humains qui les relient, avec l’amour, malgré les limbes séparateurs.

« Lettres à Samira », sur son ulime page offre à lire en arabe et en français ces mots au-dessus de son code-barres : « Merci Libraire ! ». C’est une ulime attention au lien, portée par une femme encore, l’éditrice des Lisières.

Merci Lecteur.e.s !

Extraits

13 décembre 2017

J’écoute Nahawand chanter ta chanson préférée, « O aube, quand tu pointes », et je pense à toi :
« Réveille tout le monde / Mon aimé avant tous ! »
Comme les croyants, je ne peux m’empêcher de m’interrompre : pourquoi tout cela nous est-il arrivé ? Etait-ce évitable ? Sammour, c’est une possibilité mais je ne peux me convaincre que « le destin auquel nul n’échappe » en a décidé ainsi, que tu disparaisses pendant des années, quatre années aujourd’hui qui s’ajoutent aux -quasi- quatre autres passées dans les geôles du régime syrien. Pourquoi donc fallait-il que tu disparaisses ? J’aurais aimé que nous soyons épargnés par cette épreuve ?
Maintenant que tu as disparu, ton absence est devenue ma cause, je vis et me bats continuellement avec elle, sans savoir ce qu’il en sortira, je sais seulement que j’ai une revanche à prendre et m’y tiendrai.
« Quand tu visites le quartier / Flambeaux à la main »
Sammour, ton absence m’apprend que le travail est la seule issue. Je sais bien que c’est ce qu’il faut faire mais n’y trouve aucun réconfort. Au fond, vraiment, il n’y a pas de solution à ton absence et aucun travail n’arrive à remplir le vide creusé par celle-ci ; ce qu’il faut vraiment : que tu reviennes aujourd’hui, il aurait fallu que tu sois revenue, hier déjà.

*
3 avril 2018

« J’ai un rêve » Sammour : entendre ta voix et te voir bientôt ; que nous revenions à notre vie interrompue il y a environ quatre ans et quatre mois. Mon rêve est que tu sortes à la lumière, respires et que tu secoues le poids des sombres années d’absence, que nous marchions ensemble et parlions, que nous vivions une « vie comme la vie ».
Je ne veux pas penser aux nombreuses et grandes difficultés qui t’attendent pour passer de la prison et de l’absence à l’exil. Ne t’inquiète pas, s’il te plaît ! Tu seras près de moi et autour de nous il y a différents amis, ils sont nombreux ceux que ton absence inquiète. Et à partir d’eux et de nous, une communauté d’entraide sera formée ; une société où il est possible de vivre, Sammour.
Sammour, qui a traversé ce que nous avons traversé, a fait un premier round cruel dans les années de notre jeunesse et un second plus cruel au milieu de notre vie d’adultes, pourra assurément affronter l’expérience de l’exil aujourd’hui. Sammour, il n’y a qu’une nouveauté : l’exil, c’est le monde ! Mais pour ceux qui savent que la patrie c’est l’exil, plus rien ne paraît difficile.

Baisers mon cœur,
Yassin

*
20 novembre 2018

Seul avec six portraits de toi, à l’anniversaire de ta première liberté. Mon rêve, Sammour, est que ta seconde liberté adviendra un jour que nous célèbrerons bientôt avec nos proches.
Jusqu’à ce jour heureux, « ton petit cœur » suit ton chemin, n’ayant que cette voie.
Jusqu’à ce que nous soyons ensemble, pour toujours, ici ou là.
Ou là-bas.

Yassin

*
9 décembre 2018

Pourquoi ne pas recourir à la loi du Talion ? Qu’ils goûtent exactement à ce qu’ils ont infligé aux autres. Il faudrait mettre Bachar, Maher, Jamil Hassan, Ali Mamlouk et leurs complices dans des cellules étroites et mal ventilées où ils étoufferaient, qu’ils restent des mois sans se doucher, en étant terrorisés et battus de temps en temps, que leurs parties génitales soient électrocutées, qu’ils soient sodomisés avec un bâton ou avec des bouteilles en verre et forcés à se violer mutuellement, comme ils le faisaient avec leurs victimes de la prison Seidnaya ? En les privant de la mort le plus longtemps possible. Al-Ka’ké, Dirani, Shadhili, Buaydani et Younes Al-Nisrin devraient être enfermés dans des cages métalliques puis être exhibés devant les habitants du quartier industriel d’Adra. Pourquoi ne pas leur imposer la lecture des discours de Bachar Al-Assad et de son père et leur faire passer des examens comme ils le faisaient eux-mêmes avec les détenus qu’ils obligeaient à apprendre le Coran ? Pourquoi ne pas apprendre à Bachar Al-Assad et à ses associés à prier et les interroger lors d’un examen sur les dix péchés de l’islam ou sur le livre du serviteur enragé du pouvoir, Samir Al-Ka’ké, sur la « loyauté et l’absolution » et qu’ils soient fouettés s’ils ne le connaissent pas par cœur.

Sammour, existe-t-il une voie vers la justice qui ne passe pas par la punition de ces criminels ?
(...)
Je veux voir mes ennemis privés de leurs dieux adorés : le pouvoir et l’argent. Je ne veux pas qu’ils aient faim mais qu’ils soient rationnés et mangent dans le même bol que les détenus. Je n’ai pas l’ironie de Heine et je ne veux pas que mes ennemis soient pendus avant de leur montrer ma miséricorde et de leur pardonner mais je veux qu’ils vivent longtemps comme des poussins déplumés, sans leur pouvoir assassin et sans argent dérobé.

*
2 février 2019

Le seul jour que je fête depuis ton absence, c’est ton anniversaire. Je le passe seul, avec toi.
(...)
Nous sommes devenus communistes à une époque où le communisme signifiait changer le réel, changer le monde et en même temps -et même avant- changer soi-même. Nous n’avons pu changer la réalité de notre pays, mais nous avons changé et nous voulions changer. Comme si nous voulions être le changement que nous voulions voir dans le monde, selon le conseil de Gandhi. Après la prison, nous n’étions plus exactement les mêmes. Nous avons accepté que la prison fasse partie intégrante de nos vies, tout comme la liberté.
(...)
Aujourd’hui, tant que tu es loin de moi et que je ne peux prendre soin de toi, tant que je suis loin du pays en feu où il nous a été ouvertement dit qu’il brûlera pour sauver l’incendiaire, j’essaie d’être le narrateur de l’histoire sans fin de Samira / Syrie.

Ceci est ma politique.
Ceci est mon combat.

Malgré la fragilité des outils, le vieux combattant continue sa lutte en cherchant de nouvelles voies pour mener la bataille, de nombreuses batailles.
Nous avons vécu une vie de lutte, Sammour, et nous quitterons cette vie en combattants.

Pour ton anniversaire, porte-toi bien !
Yassin

*
19 octobre 2019

En ton absence, je m’identifie à ma mère et aux mères dont les enfants ont disparu. Je suis devenu la mère de ma femme disparue, une mère pour toi, Sammour.

Ton absence me féminise grâce à cette expérience féminine.
(...)
Peut-être que les larmes aident. Elles aident les femmes plus que les hommes parce que les femmes utilisent leurs yeux pour quelque chose que les hommes ont appris à cacher depuis l’enfance. J’étais l’un d’eux. Quand ma mère est décédée, j’avais à peine quelques larmes aux yeux, j’étais en colère après moi-même. J’avais besoin de pleurer mais je n’ai pas pu. Suite à ton absence, j’ai changé. Ô combien j’ai changé !

*
9 décembre 2019

J’espère que ton nom fera référence à une lutte héroïque et mortelle, qu’il devienne symbole d’une lutte pour la liberté, la justice et la dignité, que le chagrin n’est rien de plus qu’un moment dans une lutte courageuse et honorable. Et le fait que ton absence devienne épique fait de notre cause une question de connaissance et de vérité, au-delà de celle de la justice et de la liberté.
(...)
Ton nom est désormais synonyme de ce que je veux savoir. Tu es l’absente, l’inconnue à connaître.

(Page établie grâce à la complicité de Roselyne SIBILLE)


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