« Le bonheur du jour » d’Hélène Cadou fut publié une première fois en 1956, cinq ans après la mort de René Guy Cadou, emporté par un cancer à l’âge de trente-et-un ans. Le jeune couple, qui s’était rencontré le 17 juin 1943, vivait dans la petite chambre de l’école de Louisfert, où René Guy Cadou officiait comme instituteur. Les poèmes d’Hélène Cadou sont habités par le règne du végétal, et par une voix hautement poétique, tout en musicalité et profondeur d’âme. Si les premiers textes présagent de la disparition à venir et sont porteurs d’une solitude empreinte de désarroi : Où vas-tu toi qui t’éloignes / Dans la nacelle du soleil / Vers quel village reconnu / Quel silence quels blés paisibles / Toi que je ne reverrai plus ?, les suivants portent en eux la vie, née de la contemplation de la nature, source de joie intérieure. La voix d’Hélène Cadou s’élève avec la grâce d’une colombe, plus légère que la mort, car Pour croire encore au bonheur / Il suffirait qu’un oiseau passe / Dans les fontaines du ciel. Dans « Cantate des nuits intérieures », revivent les souvenirs, le pupitre d’écolier, une petite chambre / Close sous l’abat-jour. La tentation est grande de retrouver l’absent en rêve ou dans les manifestations de la nature. Mais si, tout au long du recueil, la clarté et la pénombre se mêlent intimement, l’amour de la vie demeure le plus fort.
Je me voudrais parole claire
Et voudrais qu’à travers ma voix
Vous touchiez ma chair lourde et sage
L’étang luit sous les noisetiers
La bruyère craque de soleil
Je ne saurai jamais vous dire
Le goût profond de ce que j’aime
(Valérie Canat de Chizy)
Hélène Cadou, Le bonheur du jour suivi de Cantate des nuits intérieures
Éditions Bruno Doucey, 85 rue de la Fontaine-au-Roi, 75011 Paris
www.editions-brunodoucey.com 14 €