Nous connaissons tous ces mélanges étonnants d’émotions que la vie place en nous et nos œuvres, et quand le tragique survient, cette acrobatie à vivre la désolation tout en étant du côté de la vie.
Laurence Bourgeois est sur ce fil, et tente ici le plomb et l’or, le tissage qui réunit ; elle coule le tragique dans la saveur des mots, leur allant, leur suspens, leur moelleux.
Ils s’allient aux images d’Ellie Davies – une forêt qui prend l’arbuste sous son aile et une clairière enchantée comme une matrice... Une enfance, une famille apparaissent entre les branches.
« Écrire permet de dévorer ce qui nous dévore », disait Paul Gadenne. Comme l’auteure le dit, « L’inouï de l’homme est le retournement, la transformation, les métamorphoses qu’il traverse pour renouer avec l’innocence du vivant. Tout est dans ce mouvement sans fin, magnifique, de retournement. »
Ici, une forme les manifeste, et son charme, nourri des mystères, en nous les prolonge.
Jean-Marc Barrier
Laurence Bourgeois
« pour tenir la promesse de l’Un, autre nom de l’amour peut être, il faut descendre au temple de la matière, au centre de la nuit et au cœur de son être » Sylvie Fabre G
Laurence Bourgeois, poète, artiste du verre, vit dans le piémont pyrénéen, en pays de Kercorb. Elle écrit des poèmes avec l’intuition que quelque chose va se passer, quelque chose de sacré qui peut tout bouleverser...
Elle a vu plusieurs de ses recueils être édités : Feu blanc (éditions du petit pois) , Falaises du corps, Nili Fossae (Rafaël de Surtis), Rendre l’or (éditions Pourquoi viens-tu si tard).
Ellie Davies est née en 1976, elle vit dans le Dorset et photographie dans les forêts du sud de l’Angleterre. Elle a déjà réalisé de nombreuses expositions.
« Je réalise depuis 2007 des séries photographiques dans les forêts du sud de l’Angleterre. J’y interviens de manière non invasive, pour explorer les relations complexes entre le paysage et l’individu.
J’espère que mes images permettent au lecteur d’imaginer mon sentiment en présence
de ces espaces forestiers, et leurs larges possibilités narratives. »
La nature règne, l’instinct ne demande qu’à vivre, et dans ces mouvements, l’écriture parfois nous devance, bouscule nos prudences – alors naissent des apparitions, un sentiment de retrouvailles.
Dans l’enfance déjà, les contes parlaient une autre langue qui traversait les apparences.
Avec Béatrice Pailler, cela s’éprouve par le corps – et le corps de la langue –, les jubilations qui naissent en sont végétales, animales, nocturnes et langagières.
Dans ses dessins, Valérie Rouillier porte une liberté, trace une sente plutôt qu’une route – elle incarne une spontanéité assumée qui l’affranchit. L’acte poétique se constitue de cette sincérité aventureuse.
Ainsi deux libertés ouvrent un bel espace où lire Louves devient une expérience, où le lecteur touche et déplie ce qu’il aime en lui d’instinct et d’amour de la langue. Et à l’unisson des signes et des rythmes, des nuits, des forêts et des pages, en compagnie d’animaux qui portent notre profonde vitalité, nous touchons à une beauté vive.
Jean-Marc Barrier
Béatrice Pailler
« Être admis dans le foyer de la Nature ne coûte rien. Personne n’est exclu, c’est de nous-mêmes que nous nous en excluons. »
> Lettre de Henry David Thoreau à H.G.O. Blake, 8 décembre 1855
Béatrice, poète, vit à Reims, ses activités s’inscrivent dans le temps long de la Nature.
Elle écrit des poèmes où les mots, leur musique, se veulent l’écho charnel des voix du vivant.
S’expriment alors, la sève et le sang, l’eau et la lumière où homme et infini se rejoignent.
Les revues À l’Index, Arpa, Décharge, Traversées, Les hommes sans épaules, Diérèse, Terre à ciel, Recours au poème… accueillent ses textes.
Ses recueils les plus récents sont : Sacre, 2019, Racine & Icare,
et Goûte l’Eau, 2018, revue À l’Index.
Valérie Rouillier
Je suis née en Belgique en 1962. Je travaille à Bruxelles en tant que professeur de dessin et de gravure à l’ESA LE 75.
Mes dessins réalisés dans des techniques mixtes, s’inspirent principalement de la nature.
La nature et ses mutations perpétuelles, ses richesses plastiques m’interpellent.
Mon approche est instinctive, un élément dessiné en entraîne un autre dans l’aventure.
L’ambiguïté entre le figuratif et l’abstrait est entretenu pour inviter vers un ailleurs.
Les mots de François Coudray dévalent car c’est « à la ramasse » que l’émoi nous tient, quand mémoire et présence s’accrochent aux pierres et aux brindilles. Corps et matières s’épousent dans une course où les mots créent le souffle dynamique qui seul incarne la profondeur et l’épiderme des sentiments.
Même mouvement et même instinct dans les dessins de Vanessa Durantet, la vivacité (la sincérité) du trait et la fraîcheur des teintes créent l’incarnation du sentiment vif de notre présence à la nature irréductible et à ses pentes.
Au verso qui s’épanouit comme la vie en nous, les pierres et l’espace semblent dessiner deux ailes qui se rapprochent – rarement pudeur, sublimation et vitalité auront chanté ainsi à l’unisson.
Jean-Marc Barrier
François Coudray
Né en 1977 dans les Alpes, François Coudray vit actuellement en Amérique latine. Il ne cesse, à travers sa poésie, d’interroger la douceur et la déchirure d’être de ce monde et les lieux de l’habiter. Il a publié une dizaine de livres et de livrets, collabore régulièrement à plusieurs revues et aime s’engager dans des projets qui l’amènent à faire dialoguer poésie, musique, théâtre et arts plastiques.
Parmi ses ouvrages récents : croisement des silences (la fabrique poïein, 2019), l’enfant de la falaise (L’Harmattan, 2018) et l’herbe noire (éditions du Frau, 2016).
Vanessa Durantet
Vanessa Durantet est graveuse et dessinatrice. Elle puise son inspiration dans la contemplation de la nature dont elle trace les mouvements internes. Eau vibrante, formations rocheuses, c’est une plongée dans la matière vive qu’elle choisit de saisir sur l’instant. L’association des techniques de taille douce est à la base de son processus créatif.
La couleur s’y affirme avec puissance et délicatesse. L’ensemble des procédés de la gravure en tant qu’image imprimée sont au cœur même de ses recherches actuelles.
Vanessa Durantet vit et travaille à Lyon ainsi qu’à Villefranche sur Saône au sein de l’atelier Alma.
Dominique Sierra, éditrice de la tête à l’envers, a confié à Jean-Marc Barrier l’animation de cette collection fibre.s, où il invite un auteur et un artiste à joindre leurs univers.
Comme les fibres, destinées à la reliance et à l’expression d’une vitalité, les petits livres de la collection nouent mots et images dans un même mouvement, pour dessiner l’arbre de nos étonnements, le muscle de nos émotions.
Et rien de ce qui est humain ne leur est étranger.
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