Train
nous n’aurons plus d’été
à dessabler les joues
envelopper les corps de tissus secs et vifs
à creuser les mots d’ouvrages
-d’encres et de riens-
et ton bras blanc
ton bras blanc décomposé là-bas
nous n’irons plus
-arroser les ruisseaux
-jeter des glaçons aux soupes de pain de vinle train roule si vite
essuie mon chagrin
plus de fauteuil plastique
mi-ombre et mi-sommeilje déteste
arbres-haies-colza brûlant-
champs labourés/hirsutes
les poteaux électriques et leurs fils
enfants raides tendus coupants hautains
tous pareils
le ballast de bure
et les touffes de genêts
les lapins au cul blanc
dans les champs le matin
la douleur des murs
la voix du contrôleur
arbres-haies-colza brûlant-
champs labourés/hirsutesnous n’aurons plus d’été
à ensabler ton ventreet les gares où descendent
les morts et les vivants
hôtel des voyageurs et les horloges rondes
panneaux indicateurs et parkings bouffis
mon mouchoir à chagrins est plein de carreaux sombresallez viens
j’aime un peu les lapins
leurs petits culs pelés
l’ombre de leurs oreilles
et leurs chapelets de perles
à cache cache dans l’herbeagitée de murmures
Mini-entretien de Clara Regy par Cécile GUIVARCH
D’où vient l’écriture pour toi ?
La question posée comme ça, me fait penser que l’écriture est comme une petite personne. Une petite personne qui vient frapper chez moi, je lui ouvre et nous écrivons ensemble. Nous nous entendons bien, même si nos productions ne sont pas toujours très fructueuses, nous passons de beaux moments toutes les deux. En un espace coupé du « vrai » monde, nous visionnons des images, beaucoup d’images... et nous jouons avec les mots. Nous sommes de très vieilles camarades...
Comment travailles-tu tes écrits ?
J’ai déjà évoqué les images et cet espace coupé du « vrai » monde, mais ce lieu peut être n’importe où. J’ai une phrase un groupe de mots qui viennent, je me les repasse en tête « tout plein » de fois, et même si ce n’est pas top, je me mets à aimer ces mots-là ! Et les images arrivent et j’écris beaucoup beaucoup sur mon vieil ordi, et je dois TRIER. Pour le tri je lis à haute voix pour voir (!) si les mots vont bien ensemble, la mise en voix est souvent douloureuse, il faut jeter... Je laisse reposer plusieurs jours. Et j’y reviens...
Mais, quelquefois cela ne se passe pas du tout comme ça...
Quelle serait ta bibliothèque idéale ?
Difficile à dire, dans une bibliothèque on met des livres et moi j’y mets plutôt des mots, même si l’objet « livre » me plaît beaucoup. J’aime beaucoup de nombreux auteurs de poésie contemporaine, même si ce sont souvent des bribes de textes qui me « remuent » me touchent, me font rire pleurer ou qui font que je me dis...wouah le jour où je serai capable d’écrire ça... la la la. Puis on s’en fout , on peut se dire que « l’autre » l’a un peu écrit pour nous... Mais j’ai du mal « à sortir » de nos grands auteurs, ceux qui font souffrir les élèves.... Et albums pour enfants, mangas, BD et livres d’artistes : peintures, photos : tous les musées « portatifs ».
Clara Regy
Malgré quelques petits paquets de dizaines d’années Clara Regy commence seulement à sortir ses textes de ses … tiroirs.
Paysages écrits : la belle revue en ligne de Sanda Voïca et Samuel Dudouit en a accueilli un dans son numéro 15 du mois de MAI. Eric Dubois aussi sur Le Capital des mots ainsi que Chris Brégaint sur poesiemuziketc. Quelques photos aussi sur F.P.D.V. Formule polyvalente à dilution variable .
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