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Editions La Porte

mercredi 24 juin 2015, par Roselyne Sibille, Sabine Huynh

Les éditions La Porte offrent de la poésie, de l’art et de la littérature sous la forme de plaquettes, ou livrets (format : 10 x 24 cm), cousus main par Yves et Monique Perrine, dans leur atelier à Laon, en Picardie. Plusieurs raisons font que nous sommes, chez Terre à ciel, des inconditionnels de cette maison exigeante, sans parler du fait que la plupart d’entre nous sont fiers d’y avoir vu leur travail publié avec soin.
Tout d’abord, La Porte est un micro-éditeur de poésie assez confidentiel (pas de site web consultable en ligne, les titres sont toutefois référencés par la BnF, plus de cent à ce jour), mais dont les livres se sont tout de même fait connaître, par le bouche à oreille, grâce à leur qualité. Depuis au moins une douzaine d’années, cette maison publie, chaque trimestre, des recueils de poètes confirmés tout comme de découvertes.
Les élégants livrets de couleur ivoire, qui comportent jusqu’à 24 pages, sont édités en général dans la collection “Poésie en voyage” et tirés à deux cents exemplaires, numérotés.
Le fief des éditions La Porte à Laon abrite aussi des archives uniques : Yves et Monique Perrine invitent chacun de leurs auteurs à leur envoyer leurs poèmes écrits à la main, une fois ceux-ci publiés.
Finalement, les abonnés reçoivent dans leur boîte aux lettres, en accompagnement aux recueils, des cartes et des photographies exquises, en petit format, confectionnées par les éditeurs eux-mêmes, avec toujours un petit mot personnel au dos, et quelquefois, un des minuscules livrets, dont les éditeurs disent : « Les minuscules livrets sont pour nous une façon d’accommoder les restes (de papier) et surtout de faire plaisir aux amis de La Porte ».
Cette maison a donc tout pour plaire. Voici un florilège des textes qu’elle publie.
(4 € le livret. Abonnement : 6 livrets 22 € port compris pour la France. Règlement à envoyer à : Yves Perrine, 215 rue Moïse Bodhuin, 02000 Laon.)

Sabine Huynh

je t’envoie des cartes
de feuilles d’arbres et de mots mêlés
tu les accroches au mur de ta chambre
pour faire à tes rêves un lit de mousse

Cécile Glasman
Une autre manière de ciel
2011

1.

Une fois franchie
la porte nous a laissé derrière nous -
et d’un seul pas nous sommes devenus futurs

poussant droit dans son mystère
on s’en remet à l’ombre
qui nous attendait alors

voici que s’ouvre d’un coup
une épaisseur d’inconnu
encore à fendre

Gérard Titus-Carmel
La Porte
2012

toiles de mots
tisses pour nous

je voudrais qu’elles brillent
comme les fragiles entonnoirs
des araignées dans les buissons

le temps s’y accumule
sans laisser de poussière.

Christian Garaud
La cigale bien attachée
(plus ou moins) - 3

2012

des compte-rendus d’échographie on vous demande tout sur lui sur vous, si vous disposez de films vidéos de votre enfant dans les premiers mois & années de vie non vous n’en avez pas, il nous serait très utile que, dans le cadre des recherches que nous menons, cette angoisse avec le soir qu’écarte votre fils souriant battant des mains comme si de rien

Romain Fustier
Comme si de rien
2013

elle revient

avec le vent
et les hirondelles

pousse l’air sur son passage
je m’écarte de tant de clarté

Cécile Guivarch
Du soleil dans les orteils
2013

Si loin en avant
Il n’y a plus de lisières

La flèche n’atteint pas
Parce qu’il n’y a plus de cible

Ira-t-il jusque là
Le scarabée en attente dans la poussière
Dos luisant pattes arquées

Les mots tiennent le passage

Françoise Hàn
Scarabée en attente
2014

le soleil d’aube à aube nous trompe ô Virgile
l’attente d’un roi errant ressemble à la mer
Pénélope se noie dans la nuit décousue
les doigts de pluie lui tissent une robe d’eau
tandis qu’un mendiant parle au chien de la mémoire
l’île tourne au vent d’un beau songe d’hier

Hubert Haddad
Glossaire de la pluie
2014

Ciels de fils invisibles
tendus
par-delà les miroirs
et la rumeur des villes

lent charroi des ans

un milan plane
candeur du vol en majesté
cercles luminescents
aux avant-postes
du désir

vertige

Angèle Paoli
La montagne couronnée
2014

Humble dans mon corps, le matin se glisse :
l’odeur du café, du pain grillé
tout ce temps entre nos mains
et je songe aux pommes de Cézanne
sur la table, sereines, impérissables.

Le vent commence à froisser le jour
et pendant que je retourne à l’intérieur
de moi, des volées de mots s’agitent, bientôt
se posent sur des lignes compactes.

Je vois surgir le reflet de ton visage, la vie
– tout ce temps entre nos mains –
s’ancre, comme un bateau enfin prêt
à affronter le voyage.

Hélène Dorion
Comme livres d’amour
2005

Et je me lève, c’est la chaleur. La poussière

Tarde à tomber sur les buissons du bord de la route.

Le temps cherche ses marques. Je compte, mais j’ai perdu

Les nombres. Les voix qui chuchotent font dans l’ombre

Comme une clarté bougeante. J’ouvre les bras, je déplie

Mes jambes. Je me dresse avec peine. Le monde ne m’a jamais paru aussi étroit.

Jacques Ancet
Debout, assis, couché
2014

La leçon de Balthus :

Peindre pour
Faire tomber la vie dans la vie

Mais dans la vie originelle
Qui est le frémissement
D’un presque silence
Contenant pourtant tout l’espace
Peindre comme un geste
Infini :

Peindre comme l’eau de source bute
Sur les syllabes
Comme elle échoue à trouver
Une fin à son poème

Peindre comme vivre

Matthieu Gosztola
Rencontre avec Balthus
2013

Marcher devient source d’énergie ; vivre au jour le jour c’est aller à l’encontre du hasard. Tout est sens, dessus dessous ? Tu ne marches plus dans le monde, un monde somnambule marche au-dedans de toi. Vers qui te tourner ? Le froid et la faim te rappellent la réalité du corps : un corps emmuré au silence, égaré, ballotté, rejeté, un corps qui doit se forger de nouvelles clefs pour vivre.

Joseph Pacini
Chemins d’errance
2014

Heures volatiles éternisées

Les fol avoines tapotent patiemment la lumière

Pourtant le soir vient
caresser les flancs secs des vallons
les immenses gradins en rubans
autrefois cultivés

Amplitude majestueuse de tout un paysage

Roselyne Sibille
Chaque jour est une page
2014

le manche du couteau
tu me dis
c’est de l’or

sous son chapeau
de paille
un homme sème
des graines
de magie

la lame du couteau
s’enfonce
dans le pain
et taille des sifflets
disparaît
dans son antre
et blesse la poche
du pantalon
de toile

bleuie

Clara Regy
Ourlets
2015

je connais des perles qui sont des larmes
et des passantes de lentes palombes

cette nuit je l’ai vue timide ma vie – recluse dans l’odeur du papier
pareille à un arbre amoureux à côté d’un autre arbre
avec des cerfs aux bois pleins
d’aurore
le front lourd d’une terreur qui est la plus belle ombre
et qu’on appelle une phrase
je l’ai vue – debout regardant droit dans l’astre crasseux
promenant ses ballades d’une bouche à l’autre
le daim noir d’un caniveau
venir sur la mer aux racines âpres

Sylvie-E. Saliceti
Et quand tu écriras
2015

Le chemin commence
par l’œil qui crisse
du fond de la mémoire
par l’attente d’aller
au-delà des ramures
légères comme un voile
sur une image de défunt

chaque instant se forme du fond de l’exil
allée muret sous-bois
rencontre
avec le bruissement de soi
avec la roche ronde
_- le récif et la vague -

Gilles Lades
Une source au bout des pas
2014

de quelques mots
tu as allongé
l’ombre des arbres
alourdi mes semelles
tu m’as traversée
le corps
du petit cri pointu
de longs ciseaux d’acier

Amandine Marembert
Neige tremblée
2012

au nuage venu manger dans votre main
et à la note inespérée

au givre qui fleurit les vitres
au feu sonore de la cheminée

au fleuve qui se fait du mauvais sang
au vent plus vaste que la mer
à la criée des mouettes

Gilles Baudry
Votifs
2010

On se repasse en boucle
La même histoire
Cela n’a pas de fin
Les rêves resurgissent
Chaque nuit
On se demande ce qui
Finalement prédomine,
Le présent ou le passé,
Le passé dans le présent.

Valérie Canat de Chizy
La chambre des parents
2012

Elle est
n’est pas
ce corps pur composé
où j’essaie de te dire
les espaces intriqués
de langues entre-croisées
les ponts de signes
qui s’élancent
hors du tohu-bohu
des désirs sur pilotis

elle est ce corps-capharnaüm
de poubelles et d’îles grecques
dans une assourdissante fureur
allègre
qui transcende les grues
grignotant inlassablement
l’horizon

Sabine Huynh
Ville infirme, corps infini
2014

il est des gens portant des
petites cloches de vent pur.

Il est toujours temps de s’entretenir
avec l’herbe sur l’herbe, de
laisser danser les grillons.

Plie les doigts.

Couvre-toi d’eau douce dans l’eau

Israël Eliraz
Il doit sûrement en être ainsi
2006

Ma main ne vit
que pour se poser sur toi,
dans une caresse
qui serait
un murmure du satin,
un aveu
du satin.

Matthieu Gosztola
Klimt, nos rendez-vous viendront comme viendra la neige - « monologue »
2015

de mon salon sous les pins
j’observe les moineaux picorer
le pain du déjeuner et partir
repus dans les cieux le bec
blanc de mie en avant transpercer
l’air en forme de ballon de baudruche
c’est ainsi que la mélancolie
naît
à moitié oiseau
à moitié neige

Thierry Radière
Juste envie de souligner
2015


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2 Messages

  • Editions La Porte Le 12 novembre 2015 à 08:03, par remy cassal

    Bonjour,
    Voilà une belle initiative. Suggestion : peut-être pourriez-vous varier avec de fines nuances la couleur du papier de chaque volume...
    J’ai pu y croiser un poème de Gilles LADES. Est-ce bien ce poète du Quercy que j’apprécie beaucoup ? Il semblerait que oui.
    En tout cas, chaque contribution révèle de belles écritures.
    Belle journée à votre maison d’éditions.
    Rémy Cassal Couze Saint-Front (Dordogne)

    Répondre à ce message

  • revues.lacavelitteraire.fr Le 22 juillet 2017 à 17:04, par morin jean paul

    Madame, Monsieur, bonjour,

    objectifs du message : prise de contact et invitation à consulter le site de la Poéthèque de La Cave Littéraire où il est déployé une partie des publications des Editions La Porte : voir « revues.lacavelitteraire.fr » rubrique Poésie en voyage
    Aurez-vous la disponibilité pour accuser réception de notre message ? Nous l’espérons. Pour envisager, notamment, un prolongement au bénéfice de Poésie-en-voyage et de la base de données de la Poéthèque

    Merci.
    Cordialement
    Jean Paul Morin, responsable de la Poéthèque

    Répondre à ce message

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