El idioma del laberinto
I Nada se entiende en estos días : ¿No somos todos II Frente a los signos vencidos, [De Los augurios] |
Le langage du labyrinthe
I On n’y comprend rien de nos jours : Ne sommes-nous pas tous II Face à la défaite des signes, [De Los augurios] |
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Sentidos
I En los ojos II En la piel [De Los augurios] |
Sens
I Dans les yeux II Sur la peau [De Los augurios] |
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A veces, en la mañana, el amor se hace despacio sobre sábanas viejas, y los cuerpos se niegan el saludo y luego se precipitan, y se ajustan, y así negocian y conviven, como la arena y el escombro. Y luego penumbra y pena una cocina sucia una escalera fría una puerta cansada que se abre y se cierra. Es la desgracia, amor, que esta mañana nos ha encontrado revueltos en rabia en penumbra y en vela. |
Parfois, au matin, l’amour se fait doucement sur de vieux draps, et les corps s’ignorent et puis se précipitent, et s’ajustent, et ils négocient ainsi et s’entendent, comme le sable et le gravat. Et puis pénombre et chagrin une cuisine sale un escalier froid une porte fatiguée qui s’ouvre et se ferme. C’est le malheur, mon amour, qui ce matin nous a trouvé entortillés dans la rage dans la pénombre, en éveil. |
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José María Gómez Valero
né à Séville en 1976, publie son premier recueil de poésie, Miénteme (Mens-moi) à 21 ans. En 1996 il lance avec le poète David Eloy Rodriguez le collectif « d’agitation et d’expression » poétiques La Palabra Itinérante (La Parole Itinérante), qui entend promouvoir une « poésie en résistance » qui « combatte la servitude » et « émancipe les consciences » (sumalespanta.blogspot.com.es). Comme l’indique son manifeste cette « communauté » entend « réunir des écrivains et artistes soucieux d’apporter leur art aux gens comme un outil qui puisse nous aider à vivre plus vivants ; à mieux comprendre, à sentir, à transformer et qui offrent des espaces et des temps pour la réflexion critique, la rencontre et le dialogue ».
Ne concevant la poésie que comme « parole vivante », les deux poètes, qui travaillent en étroite collaboration, s’en font d’infatigables colporteurs. A la fois animateurs d’ateliers de création littéraire, monteurs de spectacles (autour du flamenco notamment), ils ne cessent de porter la poésie dans les écoles, les prisons, les places publiques, les bibliothèques, les universités, emmenant avec eux peintres et musiciens, mêlant les gens, les genres, les arts, les âges. Ils ont également participé à de nombreuses rencontres poétiques ou musicales notamment en Macédoine, en Russie, en Irlande, en Italie, en France ou au Maroc. Ils écrivent également à quatre mains des paroles pour le flamenco et des livres illustrés pour enfants (http://sumalespanta.flavors.me/#vimeo).
En 2005 ils ont créé la maison d’édition Los libros de la herida (Les livres de la blessure) pour donner à lire « une poésie pour penser le monde, des mots qui racontent la blessure béante du vivant, son horreur et son miracle », mais aussi essais et récits (librosdelaherida.blogspot.com.es).
José María Gómez Valero est notamment l’auteur des recueils, souvent primés, El libro de los simulacros (Le livre des simulacres,1999), Travesía encendida (Traversée enflammée, 2005), Lenguajes (Langages, 2007) y Los Augurios (Les Augures, 2011). En 2016 est paru une anthologie de sa poésie sous le titre Revueltas (Révoltes). Ses poèmes figurent dans plusieurs anthologies en Espagne, en Amérique Latine et en Italie. Plusieurs d’entre eux ont été publiés en France par la revue Phoenix.
Il est particulièrement actif dans le domaine de la pédagogie de la création littéraire et a travaillé dans de nouvelles méthodes et instruments pédagogiques qu’il met en pratique dans des ateliers pour adultes ou pour enfants. Gomez Valero invite ainsi les apprentis poètes à observer le monde, se libérer des servitudes, se « désenfermer » et à exprimer l’émerveillement tout autant que la révolte.
Lui-même a souvent recours à des poèmes qui tiennent en quelques mots, au style dépouillé, au rythme très étudié, qu’il « décoche comme des flèches », selon l’image qu’il utilise, comme autant de cris de colère, d’interrogations faussement naïves mais aussi messages de tendresse et de solidarité, souvent empreints d’humour.
« Il est des mots qui nous mordent la voix / comme des chiens furieux qui fuiraient le feu. / Des mots qui font voler en éclat les barrières du temps. / Des mots qui réveillent. Il est des mots », écrit-il dans Traversée enflammée.
« Quelle tristesse la vie / d’une ligne droite / si seule / si droite / si uniforme », songe-t-il dans Le livre des simulacres ou encore dans les Augures : « Ne sommes-nous pas tous étrangers dans la ville du bruit et de l’argent ? ».
Conseil de chien
« N’enterre pas ton os pour le reprendre demain. Il aura un goût de terre ».
Guerre
« Après la bataille les héros revinrent./ Rien n’avait changé en eux./ Ils avaient les mêmes yeux fermés qu’avant leur départ ».