Entretien avec Patrice Breno, par Cécile Guivarch
Cher Patrice Breno, vous m’avez envoyé les deux derniers numéros de la revue Traversées que j’ai pris beaucoup de plaisir à parcourir. La revue en est à son 96ème numéro, la revue étant trimestrielle je mesure ici le chemin parcouru. J’ai ainsi une question toute simple à vous poser : comment et de quelle impulsion est née la revue ?
Le sentiment que beaucoup de personnes avaient des textes de qualité et qu’ils n’osaient pas ou ne pouvaient pas publier. Et le besoin de mettre ces textes à la connaissance d’autres. Au départ donc, nous avons surtout publié des auteurs non confirmés et progressivement des auteurs plus connus nous ont fait confiance et sont venus s’ajouter au vaste panel des plus de 1100 auteurs publiés à ce jour par la revue…
J’aime beaucoup son nom « Traversées », cela m’évoque beaucoup de choses. Pouvez-vous nous dire ce que cela évoque pour vous ? Comment s’est-il imposé ? Et aussi si au fil du temps, ce nom s’est confirmé, s’il a pris d’autres dimensions ?
Traversées peut s’entendre de différentes façons, sur le plan géographique bien sûr, mais aussi et surtout sur le plan imaginaire : des traversées entre le monde de la création et celui de la lecture par exemple. Au fil du temps, bien sûr, le nom a vraiment pris sa raison d’être puisque nous avons publié des auteurs des cinq continents, que nous nous sommes ouverts aussi à différents genres, comme par exemple les haïkus, les aphorismes mais aussi à la traduction (du japonais au bulgare, en passant par le grec, l’anglais, le néerlandais et un tas d’autres langues)…
Je note dans la revue une large place accordée aux poètes, à leurs textes. L’édito est à la fin également, ce qui confirme certainement ce souhait de laisser les voix s’accorder tout au long du numéro. Pourquoi ce souhait ? Pourquoi ne trouve-t-on pas d’article critique ?
Nous préférons laisser place à la création littéraire. Les articles critiques et autres recensions se retrouvent sur le site, question aussi d’immédiateté. Quand un numéro sort de presse, les deux suivants sont quasi complets, ce qui signifie qu’un article reçu aujourd’hui ne pourrait paraître sur papier qu’au minimum six mois plus tard.
Tout est soumis au comité de lecture, même ce qui est destiné au site.
Mon intention, en insérant l’édito à la fin, est de laisser la place aux auteurs de création et de clôturer ainsi le numéro par des mots d’humeur !
Le sommaire est composé de noms d’auteurs que Terre à ciel connaît ou pas, des auteurs confirmés, d’autres qui le sont moins, des auteurs qui semblent tous répondre à une certaine exigence de votre part. Vous avez un comité de lecture. Comment fonctionnez-vous, comment choisissez-vous ces textes ?
Tous les textes que je reçois sont soumis par courriel au comité de lecture. Ce comité est paritaire : deux hommes et deux femmes. Mais aussi virtuel : Corse, Beaujolais, Lorraine belge, Paris. Si l’un d’eux dit NON, c’est NON ! Dès que je reçois des textes et des manuscrits, je les leur envoie. Généralement, je reçois une réponse dans les quinze jours au plus tard. Dès que les textes sont acceptés, je les insère dans un numéro à paraître…
De très belles photos accompagnent les textes. Des photos souvent liées à la saison. Qui en est l’auteur (les auteurs) ? Quelle est l’importance pour vous de ces photographies ?
Jacques Cornerotte, membre de l’équipe de direction et designer de la revue, est le photographe le plus représenté, mais nous recevons également des photographies qui sont soumises à Jacques, en priorité, et je donne également mon avis.
Les photographies – choisies avec soin – sont souvent comme une forme respiration dans la lecture et parfois servent à illustrer certains textes.
Traversées c’est aussi une maison d’édition. Pouvez-vous nous en dire plus ? L’édition est-elle venue après la revue ? Et par quelle nécessité ?
Voici quelques années (4/5 ans) nous avons voulu nous ouvrir aussi à l’édition, car nous recevions pas mal de manuscrits. Par manque de temps et aussi par précaution financière (puisque nous prenons tous les frais à notre charge), nous ne pouvons publier que 4/5 recueils par an, alors que nous en recevons des centaines. Le but est aussi de faire connaître certains écrits qui dépassent le cadre de la revue et qui en valent la peine.
Pouvez-vous nous parler de votre catalogue, des auteurs que vous publiez ?
https://revue-traversees.com/faites-vous-plaisir-offrez-vous-les-livres-publies-par-traversees/
Vous avez certainement dû faire de belles rencontres grâce à cette aventure de revuiste, d’éditeur. Qu’avez-vous envie de nous dire à ce sujet ?
J’ai fait de magnifiques rencontres en Belgique bien sûr, mais aussi en France (Paris, Albi, Reims, Charleville…), en Italie (Université de Bari à deux reprises) et – tout au long de l’année, par courriel, contacts téléphoniques et visuels…
C’est formidable d’avoir tous ces contacts, ces rencontres, ces discussions…
Mais ça prend du temps, et pas mal de temps ! Chaque jour, je passe 2/3 heures rien que pour Traversées et mon épouse – qui est très complaisante – me rappelle parfois à l’ordre en me disant qu’il n’y a pas que la poésie et Traversées dans notre vie…
Avant de nous quitter, est-ce que vous pouvez nous dévoiler les projets à venir ? Peut-être avez-vous un message particulier à passer ?
A chaque jour suffit sa peine ! Je ne pensais jamais que l’aventure de Traversées durerait autant (de 1993 à nos jours) et j’espère de tout cœur qu’elle ne s’arrêtera pas de sitôt. Nous vieillissons tous et la relève n’est pas vraiment assurée, comme pour beaucoup d’initiatives…
Mon message, c’est celui-ci : même si je suis passionné, et il le faut, je remercie toute l’équipe de Traversées (Xavier Bordes, Caroline Callant, Jacques Cornerotte, Paul Mathieu et depuis peu Monique Charles-Pichon) qui m’épaule formidablement ainsi que tous ceux qui croient en nous ainsi que tous les auteurs qui nous ont fait confiance en nous offrant leurs textes…