À l’Enfant de Lattaquié
...
Et puis s’est levé un appel
Maram Al-Masri.
?
?
Longtemps je me suis demandé
Ce que ce petit point noir
Faisait dans l’aube
En fait
C’était mon œil
Pour l’éclairer
Petit
à
petit>
Se donner femme
Depuis la bouche de ses lèvres
jusqu’au monde
se donner
Tout ce qui vaut d’être homme aussiRouge
Depuis la braise de ses pas
Jusqu’à la perle de sa voixMaram
Certaines portes n’ouvrent
que par temps chaud de foyer
les brasOui tous ces bras qui te demandent
Un baiser.
Entre les ruines
Une femme marchait seuleUn homme à sa cuisine cendre
Tentait de ranimer les mortsIl y avait dans le jardin pour ce qui fut des fleurs
Des bombes
Un puits détruit
Un arbre secLa femme passa son regard
Sur le sol roulé de ces tombesOn vit dans ses cheveux jouer les balançoires
L’homme restait prostré au milieu des décombresElle avança
Comme dans une
photo brûlée
Elle avançaEt chacun de ses pas semblait calmer chaos
L’homme prit un oiseau dedans
Voulut chanter tout comme lui
La femme sortit de sa hancheUne lyre
On vit du rouge enfin danser
des lèvresLe ciel retrouva ses branches !
Une geste
Féconde -
Un geste
Sans nom.
Ce rouge
Maram
Il naît des enfances perduesCe rouge-là
Il a tes yeux quand tu les fermes
Pour donner braise à tes paupièresO Rouge-là,
Tu peux baigner tout l’océan
Le rouge c’est toujours du sang
Et chaud et froid de ce moment
Que les yeux tiennent beau le cielOui nous la cueillerons la vie
Voici des lèvres pour le jour
Voici des lèvres pour la nuitMaram
La fleur qui compte ses pétales
En sait beaucoup sur la passionLevant sa robe
Oui nous voyons danser dedans
Tout un printempsCe sont des lèvres qui embrasent
La vie quand elle saigne trop
Des lèvres perdues qui se parlent
Un peu moins seules dans leur rêveEt tout ce rêve est de partage
Il nous regarde quand on berce
La vie d’amour rouge mêmeO rouge même
pour rien -Maram
C’est cette enfant qui tremble qui nous dit :
Voici nos lèvres.
?
Il y eut tout
Des fous des rois
Cette enfant n’est pas morteAinsi l’Histoire
Jusqu’au saoul rire de douleur
A la morsure de nos lèvresNous fûmes
Cette enfant jamais morte –
Elle nous dit Nous pouvons être
la possibilité d’un rêve qui s’annoncePuisque tout simplement nous sommes.
?
De quoi dis-tu
D’un rien la manche du matin se mit
À délacer toute rosée
Elle marcha déshabillée
parmi nos ventresCela fit aux yeux je ne sais
Quelque marée...
De ce qui monte dans le bleu
Des yeux tombésTu la vis la vague annoncée
On la dirait coulée depuis
Ta lèvrePuis on la voit passer rivage
où trempe l’air
tu dis de quoi de rien la vie
Merci.
Frédérick Gambin
Il est né, le petit, la tête dans le ventre, un 14 avril 72. Demandez à Loustic ; il en sait quelque chose, lui, de ces élans avec la vie, quelques détours de défoulé, parfois, ce qu’on nomme colère, ou révolte. Parmi les genêts de Sannes, hameau luberonné, dans ces années de grandissante flamme, il a vu les buissons porter à lui sa raison d’être : poète !
Il s’est longtemps dès lors échiné dans les arbres, a construit ses cabanes, s’est essayé avec les feuilles. Le stylo a pointé vers l’âge des quinze ans : sonne le jour, sonne l’heure, sous la lumière d’Eluard.
Il faut bien sûr du temps pour vivre libre en l’écriture. L’école n’y aura rien fait, sinon pour apprendre à marcher un peu dans les mots ; depuis le CP jusqu’aux années parigotes, HIV et autres, c’est avant tout hors des sentiers battus que le Loustic aura foulé ses chemins de traverse.
On mettra ça au nom de crise... quarante années peuvent changer la vie ; tourneboulé, Loustic a crû, ou crue, de tous côtés ça sort, bâtisseur. Du temps présent, j’écris présent, et je dis je, avec le sentiment profond d’avoir trouvé quelque chose de vrai, de moi, pouvant parler aux autres. Par ces lignes d’une écriture qu’on appelle vers, tout ça peut devenir enfin une œuvre, un poème de vie,
Un Poème qui se vit,
en corps
et âme
Loustic
... nous signalons d’ailleurs en ça une façon de démesure chronique,
anarchiste
chrétienne
hétérodoxe
et paraphilanthrope
... pour meilleure explication : demander à la poésie.
Bibliographie
Livres d’artiste :
- La Rose
- Le Hêtre pourpre
- SucréSalé
- Un quelque chose d’Océan
Manuscrits (non encore publiés) :
- Histoires poétiques
- Les terres d’ocres
- Appel de la présence
- L’Homme-vers
- Astérographies
- Opéra –Poème Paléolithique
Deux mentions prix au festival de Montpellier 2015 (revue Souffles) : pour « Sentier(s) »
Publications en revue :
Revue Souffles, Ecrits du nord, Microbe, Dissonances N°32
+ sur le net
http://www.recoursaupoeme.fr/fr%C3%A9d%C3%A9rick-gambin/traverses
Frédérick Gambin, dans Un ange à notre table sur Terre à ciel