Extraits de Le fils du muet n’a pas la parole
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Entretien avec Clara Regy
Il semble bien que tu écrives depuis assez longtemps... mais peut-on dire qu’il y ait eu un « élément déclencheur » ?
J’ai vécu ma première résidence d’écriture - merci maman et papa - quand j’étais en seconde et première au lycée agricole de Brie-Comte-Robert en Seine-et-Marne. Sous l’influence de la forte personnalité de mon professeur de français, j’ai compris que seule l’écriture poétique pouvait être ma façon d’être au monde. Nous allions lire et écrire les auteurs et poètes au bord de la rivière à l’ombre des peupliers.
L’écriture et l’amour. Très vite alors je recouvrais par des poèmes mes feuilles vides de cours de maths et de physique-chimie.
Je ne comprenais pas comment les gens faisaient pour continuer à vivre sans écrire plusieurs poèmes par jour. Mon écriture était compulsive. Ça m’a sauvé des anges et des démons. Et de l’agriculture...
L’écriture poétique trouve-t-elle sa place dans tous les jours de ta vie ?
Oui. Si ce n’est pas sur la feuille ou dans un recueil, j’y pense tous les jours, elle m’accompagne, me parle et je lui parle. Je suis capable de la dénicher au fond d’une sombre tristesse, je sais qu’elle souffre.
Quels auteurs peuvent te réjouir te consoler ? Ou plus simplement se tenir près de toi ?
Patrick Chouissa, Bernard Sintès, Inna Maaimura, Hervé Brunaux, Stephen Sartarelli... Ça ne vous dit rien ? Des inconnus ! Mais des que je peux toucher, entendre, avec qui je peux parler, qui ne sont pas loin de moi géographiquement. Importants les lieux poétiques, très ! Leur poésie m’accompagne parce que je sais qu’ils écrivent ou le saurai dans peu de temps. Quand les corps sont distants la poésie devient trop fluide, moins incarnée.
Cela c’est pour à présent. Mais il y en a plein que je ne connais pas, que je découvre peu à peu.
Sinon dans la permanence de ma vie, il y a eu et il y a toujours les poètes surréalistes, plus ou moins, Lautréamont, Breton, Eluard, Michaux... allez, aussi Rimbaud. Il faut aller se perdre dans Charleville-Mézières en novembre !
Si tu devais -vraiment- définir la poésie en 3 mots... Quels seraient-ils ?
Anti-connerie / refuge / gourmandise
Tu as la particularité d’être à la fois un poète et un homme de théâtre, peut-on dire que ces genres s’opposent ou se complètent ? Peux-tu nous en « confier » davantage ?
Pendant quelques années, j’ai arrêté toute écriture de création. J’avais créé une section syndicale dans la boîte où je bossais et pour imposer le droit syndical face à un directeur général en retraite (de quoi ?) je rédigeais des recours en tribunal administratif. C’était long et fastidieux. J’ai gagné les sept recours ! Lorsque j’ai eu le désir de reprendre l’écriture, pour tenter d’éviter l’isolement dans lequel me plongeait alors ma poésie, j’ai abordé l’écriture dramatique. Je me disais que pour toucher physiquement un public il fallait... qu’il soit là, présent, et qu’il me renvoie enfin quelque chose de direct. N’étant pas du tout du sérail, j’ai mouillé la chemise, créé une compagnie, monté une équipe, trouvé des fonds, une metteur en scène de talent, Moni Grégo, afin de monter mes deux premiers textes.
Les deux écritures sont différentes mais des choses circulent de l’une à l’autre, elles ne s’opposent pas, elles s’arrangent, se frottent, échangent, parlementent. Une écriture théâtrale s’incarne physiquement. Une écriture poétique plane, s’envole par la bouche. On ne joue pas la poésie. On joue la comédie.
Michel Gendarme
Membre de la Poéthèque du Printemps des Poètes
Invité d’honneur du Village en Poésie (label Printemps des Poètes) de Limeyrat (24) en 2016
Édition
- Recueil et CD Mémoire Méduse Requiem, co-écrit avec Hervé Brunaux et Patrick Chouissa, Ed Gros Textes, à paraître en 2016
- Recueil Exquises Esquisses, 20 dessins de José Corréa, Ed Gros textes, 2014
- Recueil et CD, Ceux qui ne connaissent pas le corps des autres, Ed Gros Textes, 2010
- Recueil des rivages, pastel de Roseline Granet, Ed Gros Textes, 2006
- Recueil Les mots invisibles, photographies de Irène Cerquetti, Ed du Non Verbal, 2000
- Récit poétique Celui ou celle qui te regarde, auto-édition, dessins originaux de S. de Lantivy, 1981
- Recueil Dévigation, Ed de l’Athanor, 1976
Quelques Créations, Actions
- Exquises Esquisses, lecture avec la guitariste Lady Calling, Périgueux, Printemps des Poètes/Festival Expoésie mars 2015
- Le fils du muet n’a pas la parole, création en projet 2015-2017, danse Yoko Higashi, bande son et création sonore David Chiesa, voix Michel Gendarme
- Les enfants de moins de douze ans volent ! - Résidence de travail Singulier Pluriel, présentation publique au Paradis (galerie verbale) à Périgueux, 2013 avec Natacha Muslera, chanteuse improvisatrice et Jean-Sébastien Mariage, guitariste improvisateur
- Ceux qui ne connaissent pas le corps des autres, lecture sonore et visuelle, mise en espace au Paradis (galerie verbale), Périgueux, avec David Chiesa, contrebasse, lecteurs : Flore Audebeau, Juliette Lasserre-Mistaudy et l’auteur, 2009 Représentations à Bordeaux en 2012