Adeline Baldacchino : Poèmes pour traverser l’hiver
Ce recueil d’Adeline Baldacchino [1] , qui chemine comme nous l’indique sa biographie entre littérature, philosophie et poésie s’ouvre sur un hiver inexorable, implacable où l’ombre s’infiltre et dévore « la joie qui nous échappe », c’est dans cette atmosphère que vont se dérouler ces « treize matins » particuliers. Au milieu de la grisaille, les mots sont ces barques de Prométhée pour faire barrage « le vol des vautours dévoreurs ». Nulle concession facile ici sur le chemin aride de la lucidité. Si « nous avalons nos morts », il nous faut survivre à cette absence, puiser la lumière dans la parole et le verbe pour réchauffer les vivants qui sont encore là, de notre amour. Contrer le destin pour forcer l’espérance et vivre la vie que l’enfance nous avait promise, inassouvie, inaltérable :
Il y a ces promesses que nous n’avons pas faites mais que nous aurions dû faire : vivre jusqu’à la lie, vivre en plus de, sur-vivre, comme on vit parce que d’autres ne le peuvent plus, parce que d’autres auraient aimés qu’on le devienne, qu’on les continue, ce qu’ils furent étant désormais indissociables du plus tendre et du plus fragile de nous-mêmes.La poésie devient alors un paravent pour lutter contre l’absence de ces fantômes qui nous hantent : Il y a ces poèmes qu’on dérobe à l’aube pour tenir toute la journée. Ceux qu’on ramasse au fond des ruelles où s’envasaient nos cauchemars. Ceux qu’on dépoitraille pour leur aérer le cœur. Ceux qu’on tanne comme de vieilles peaux luisantes. Ceux qui s’érodent quand on les arrose. Ceux qui se froissent quand on les touche. Ceux qui se ressemblent et ne s’assemblent pas. Ceux qui ont semblant de nous sauver, quand rien ne le peut. Et nous le savons. Et nous écrivons quand même.
Dans la brume parisienne s’envase les cœurs, quand ses « tentacules de béton » enserrent les poitrines » et s’infiltre dans la joie, déchirant les cornées. Il y a cependant ce »cartable de livres » où s’arrimer pour s’ancrer dans la terre et résister, des « lignes pour habiller l’oubli » et recommencer. Les mots font « comme si » et ce semblant qui nous leurre nous permet de croire que la vie vaut la peine d’être vécue. Les livres sont alors des ballons pour s’évader par-dessus le temps et voyager, comme si l’enfance revenait et que le monde s’avérait aimable, comme si la vie pouvait se refaire et se réinventer « dans l’espace réduit du possible. » Les illusions qu’on aimait alors se réveillent, « à la nuit tombée dans l’abattoir des anges ».
Dans les rues de Paris quand on rêve d’ailleurs, anywhere out of the word, les « poètes ont toujours torts et la vie a toujours raison » :
Et secrètement logée dans le pli
Qui sépare la douceur de la peur
Le scintillement
D’un glissement
Elle brillait l’âmeImplicitement on devine qu’en cet « effroyable hiver », un travail de deuil est en cours dont chaque poème constitue comme l’écharde ou l’épine douloureuse que l’on voudrait arracher mais que l’on ne peut qu’écrire pour tenter de circonscrire la souffrance :
Matin d’hiver
Où l’on s’efforce de se dégivrer l’âme
A coups de rame et de boutoir
Qui portent sur la glace
Et ne percent jamais le mystère
A grands coups de battoir
Contre les banquises de l’effroi
Jusqu’à
Se lever et pousser un petit cri de joie
Les mains posées sur la tasse fumante
Le café plus noir que la nuit
Qu’on laisse enfin derrière soiLe poème se fait alors célébration et souvenir comme dans ce texte également si touchant écrit sous forme d’hommage :
Qui prendra soin de toi parmi les livres
Que tu donnais comme tu les aimais
Un peu beaucoup à la folie
Passionnément comme s’il disait
Tous les trains que tu n’avais pas pris
Avec Blaise Cendrars et toute les vies
Que tu t’étais rêvée
Près de la Kasbah quand tu grimpais les pentes
Que tu cherchais l’ombre de celui qui serait mon grand-père
Sur une plage d’Alger.Ce recueil aride comme la période qui est ainsi traversée, l’hiver devenant la métaphore du travail de deuil, laisse percer toutefois quelques fugitifs élans de désir ou de joie où petit à petit, la vie semble refaire surface et reprendre ses droits. De sorte que sous nos yeux se déroule un vrai travail de réparation, lent et patient à travers lequel chacun peut se reconnaître, pour retrouver enfin « cette âme qui s’est mise à danser dans un corps qui l’aimait. »
Thomas Vinau – C’est un beau jour pour ne pas mourir – Le Castrol Astral, 2019
A la façon d’un almanach poétique, Thomas Vinau nous propose 365 poèmes pour traverser l’année. De cette écriture que l’on devine quotidienne surgit quelques frémissements tissés de plaisirs simples où l’inquiétude qui se manifeste parfois est vite combattue par l’ironie, l’humour et beaucoup de sensualité :
Attentif à ce qui se manifeste, ces écrits tentent de fixer quelques vertiges dans un style dépouillé qui s’apparente parfois aux haïkus. L’attention portée aux détails parfois les plus infimes évoque cette façon propre à C. Bobin de créer à partir de presque rien quelques enchantements quotidiens où seul compte la présence, l’être au monde. Un recueil sensible et frémissant.La lumière n’a pas besoin de stylo
Le bruit de mes pas sur la neige
L’appel d’une buse
Une goutte figée à la pointe d’un barbelé
Les traces de chevreuil qui vont se perdre dans les bois
Aujourd’hui le poème s’est écrit sans moi.Mite
Les mots
font des trous
dans l’impossible
Genevièce Clancy entre ombre et lumière
Dans un de ces recueils, Geneviève Clancy [2] , semble donner elle-même la définition la plus juste de la singularité de son style et de sa quête : « Tous les témoins ont parlé d’elle comme d’une écriture allant de l’infini à la chair. Quelle est cette rumeur qui avertit de la perte que porte en elle la parole dans le combat du silence et du temps ? » [3] Sans cesse, ses écrits interrogent notre fugitive incarnation vouée à la séparation et à l’incomplétude mais habitée par la quête de l’unité comme un impossible envol. Cette aspiration permanente entre abstraction et temporalité crée une tension permanente ou un déchirement qui ressurgit à chaque page. Si la totalité reste inatteignable, nous ne pouvons, pense-t-elle, en saisir que quelques éclats contradictoires. Ces lueurs ne sont que l’ombre projetée d’une lumière qui nous reste inaccessible mais qui hantent l’œuvre comme sa part d’indicible.
Pour atteindre cette part d’infini, il faudrait pouvoir s’affranchir des images et n’être plus que pure vision sans intermédiaire. Afin de libérer en quelque sorte cette part d’inconnu qui entoure toute chose, comme un halo : « Lorsque le poème capte un fragment du passage des choses, il entoure son énigme d’un trait de lumière. » [4] Les mots portent la trace de cette aspiration permanente à la « voyance » tout en étant voués à une irrémédiable impuissance. Jamais ils ne peuvent coïncider avec la chose elle même. Si les mots « ne consolent » pas, ils témoignent cependant de ce que G. Clancy nomme « la présence », et donc de notre « être au monde » à la fois tragique et radieux : « Entre les plis d’effroi et de peines du monde quotidien, le poème peut redonner sa puissance de lumière à un arbre, une étreinte parce qu’il délivre le réel sans y superposer une autre vue. C’est cela rétablir la présence par l’éclair où l’image fait être la profondeur qu’elle appelle. Là s’engendre une autre histoire qui perd sur le temps pour devenir immortelle. » [5]
L’usage de la métaphore ou de l’aphorisme, vient pulvériser ou atomiser le sens, dans l’espoir de frayer un passage vers cette part d’inconnu qui entoure notre réalité. Ainsi, elle préfère au triomphe de la signification, « Le vol descellé des fragments sur le sens ». En cela, elle semble renouer avec ces temps premiers où la philosophie ne se séparait pas de la poésie, ce dont témoignent les présocratiques et notamment Héraclite. Nietzsche par la suite reprendra à son compte cet héritage originel. En effet pour lui le concept n’est que la trace d’une métaphore oubliée. En ce sens, toute théorie n’est en définitive qu’une fiction.
De sorte que seule l’obscurité, ce que G. Clancy nomme « la nuit », pourrait peut être nous rapprocher de ces vertigineuses profondeurs vers lesquelles tendent l’œuvre : « Le poème se fait passeur d’une énigme où la parole univers de l’Etre élit le mot non pour son sens mais pour sa nuit. La nuit des mots écoute originaire où s’entend rêver la profondeur des mondes... En nuit l’océan prend la parole par notre intimité première avec l’illimité, il énonce sa profondeur comme un manifeste de l’insondable (…). » [6] Mais « ce bord de nuit » de la pensée peut-il être réellement atteint autrement qu’à travers notre propre disparition, sorte de point-limite qui hante le poème comme la face cachée d’un Réel impensable. De sorte que le poète ne peut que témoigner de cet insondable et originaire mystère qui nous habite dont il se fait « le passeur » ou le témoin :
« La part de l’invisible est peut être cette minceur du verbe d’où l’on voit l’arbre et la tombe mêlant leurs fruits. Le témoin parle :
- de l’aurore obscure de l’oubli
- de la terre entre miel et mort
- de l’impossible nudité
- de la brûlure
Du cercle sur l’éblouissement du voyage » [7]Le signe ne serait donc qu’un palier vers « l’inconciliable » qui nourrit une sorte d’errance sans fin : « Quel nomade dessine la frontière des choses ? Larmes liées aux larmes que l’homme porte du désert au fleuve et l’on parle de ce ciel caché sous la chair et qui efface l’âge des espaces. » [8] De sorte que la parole poétique ne peut être réellement chez elle, nulle part. L’étranger ou l’étrangeté est son lieu. Du soleil, nous ne connaissons que son ombre projetée qui dessine les contours de ce monde sensible qui est la seule réalité que nous pouvons approcher. Le reste en définitive porte le mystère de la question : « On ne voit pas la lumière mais ce qu’elle distingue, en cela le signe est l’ontotélie du poème. » [9]
Portant la nostalgie du « Tout », l’écrit tisse à travers blessures et absence, la trame de nos vies entre incessante métamorphoses et pertes : « Sans doute faut-il réapprendre à lire les fleuves, la clarté des sources, l’émotion du vent et de l’arbre pour prendre la mesure des effacements et des absences qui font l’obscurité de notre devenir » [10] L’unité ne peut, en définitive, s’atteindre qu’à travers les visages changeant de l’altérité qu’interroge inlassablement la parole poétique dans son épiphanie : « Il y a cette coupe de temps où l’avenir se suspend pour laisser voir le Tout. Puis le poids revient sur l’éveil nous rendant à la nostalgie.
Est-ce la présence ?
Il y a cet appel mélancolique qui monte de la beauté, écho de nos peurs à briser les attaches des rêves qui ont perdu la mémoire du vol.
Est-ce la présence ? (…)
La présence, passeur traversant les formes pour délivrer les profondeurs qu’elles retiennent… » [11]Entre ombre et clarté, inlassablement, G. Clancy n’aura donc jamais cessé d’interroger cet espace intermédiaire où toute chose se donne à lire à travers le miracle de son apparition : « Quelle entre-lumière disperse les lignes de blessure, comme pour celer l’œuvre d’écriture où vivre soit ce qui le lie au tragique ? » [12] La nostalgie de l’unité qui hante l’œuvre ne peut nous faire oublier que nous n’existons que dans l’espace de la dualité, de la contradiction. De sorte que la pure beauté serait en quelque sorte sans médiation, à l’image d’un monde guéri « de l’attente et de la séparation. » Cette pensée de la limite ou du seuil éclaire encore notre chemin de ces saisissantes et inoubliables métaphores où « l’œil dans la nuit devient soleil » à travers « La marée haute des passeurs d’infini » : « Elle parlait de cette manière d’errer à l’accueil des choses, de toucher l’âme comme une pierre dans l’arbre, de fixer l’immobilité torride de l’horizon sur les ombres d’amant, d’entendre le poids de la lumière, de traverser le devenir dans ses figures hissés d’éternité visible. » [13]
Zéno Bianu et Odradeck – Cantiques des cantiques : songes de Léonard Cohen – Editions l’Improbable
Dans ce recueil accompagné d’un CD, Zéno Bianu et Odradeck ont adapté quelques textes de Léonard Cohen écrits en marge du « Cantique des cantiques » dans les années 60. Comme un « psaume sans âge », ces poèmes peuvent se lire comme une invocation à Salomon et à l’amour où Léonard Cohen semble mêler toutes les voix du monde en une sorte de Babel poétique. Ainsi, un seul et même chant semble parcourir les siècles et retentir dans ce tissage des langues où s’écrit la poésie de Léonard Cohen. Ce texte envoutant et incantatoire presque incandescent est magnifiquement porté par cette mise en voix et en musique. Le poète/chanteur réécrit son propre cantique du désir comme une pulsation qui semble surgir du cœur même de l’univers à la façon d’une éternelle première fois, d’une incessante redécouverte : « Et l’amour tourne à jamais me souffle le Cantique. » De cette parole qui comme « un vin précieux » réveille « les endormis » surgit ce mystère de la vie et de la création où s’origine ce désir d’écriture porté par tous les « mots du monde » : « Sulamite/je t’aime/à travers tous les mots du monde/Sulamite ». Au cœur même de la douleur, en cet entrecroisement perpétuel de la vie et de la mort surgit la grâce d’une parole ressuscitant l’ardeur de dire et d’aimer que porte le poème, à la façon d’une rose sans pourquoi et sans explications nous ouvrant aux mystères de l’être : « passion/de la parole vive/ultime refuge de l’être/rédemptions du duende/lentes pulsations/d’une vie pour de vrai/ma disgrâce et ma grâce/
« Et je te lis
Salomon
Depuis des millions d’années
La poésie c’est la réalité
La poésie c’est la réalité
Je l’éprouve dans chaque plissement de mon corps
Dans chaque repli de mon cœur
Dans les replis ensanglantés de mon esprit
Aux confins du sens et du non-sens
Avec toi
Je me tuerais
And it’s almost like salvation
Pour trouver le mot juste
Le mot contenant tous les mots
Le sésame
A même de tout révéler
And it’s almost like salvation
Je te lis et je n’ai plus peur
D’être rien
Je te lis et je scintille
Dans le frémissement de l’instant
Je suis
Un homme-question
Je suis
Le berger des roses
Brigitte Maillard – La simple évidence de la beauté- Editions Monde en Poésie, 2019
Dans ce recueil, Brigitte Maillard nous donne à voir, à contempler, cette beauté qu’elle interroge au fil des mots. A chaque texte répond le miroir d’une photographie qui ouvre notre regard à chaque horizon traversé. Si l’évidence du beau s’impose, cette présence irradiante ne cesse pourtant de nous questionner. Pour Brigitte Maillard, elle nous fait signe. S’inscrivant dans le sillage de F. Cheng, la beauté est pour elle un appel à l’élargissement de notre espace intérieur où toute différence entre ce que je suis et ce que je contemple s’estompe. Ainsi peut-elle écrire « mon corps est le monde ». En nous mettant en rapport avec un autre niveau de la réalité, la beauté est cette élévation vers l’essentiel en un échange de lumière où ce qui est vu se trouve dépassé. Chaque vers tend à imposer son évidence, pas après pas : « De rien je fais ce pas vers le monde/un pas solitaire/Pris sous la cendre/La poésie est à pied d’œuvre/Sous les nuées/Elle garde l’espace en toute clarté. » Ainsi peut-on cheminer dans le paysage « comme on entre à la porte du désir » et se « vêtir d’espace » et ainsi « naître au fil de soi ». Car comme elle nous le rappelle à travers une très belle citation de Tourgueniev : « c’est cela la vraie beauté de la poésie : au lieu de parler de ce qui est, elle chante quelque chose qui est infiniment plus élevé que la réalité et qui pourrait lui ressembler davantage. »
Verónica González Arredondo – Je ne suis pas de ce corps – éditions Raz
Dans ce recueil traduit de l’espagnol par Elise Person, la poétesse mexicaine Véronica Gonzalez Arredondo (prix national de poésie en 2014), relate dans un style lapidaire et saisissant, l’immigration clandestine des femmes en Amérique centrale et leurs disparitions alarmantes… Elle tente de leur redonner vie à travers une sorte de voix d’outre-tombe qui parcourt le texte, cette voix off de la disparition innommable de tous ces corps mutilés perdus dans l’anonymat de lieux inconnus :
« une croix devrait bouillir au milieu de nulle part
un repère sur la plaine
ci-gît un jardin hivernal
des pétales jaunes resplendissent avec une terreur
de glaciers
au fond d’un lac »Cette écriture de l’holocauste témoigne sans fards et sans détours de la sauvagerie du viol et parfois du meurtre de ces femmes perdues pour toujours et ne laissant pas même une trace. Le titre lui-même témoigne d’une tentative désespérée d’instaurer une sorte d’au-delà du corps, de fuir l’étouffante réalité. Mais de l’horreur même surgit quelques infimes signes d’espoir au détour d’une métaphore, petit fil fragile suscité par une métaphore imprévue venant renouer ensembles la mort et la vie :
« J’ai trouvé un escargot des sables enroulé dans mon palais
Un vestige de vie
Mon amulette
Son ambre illumine ma nuit »Ainsi entre le corps et le désert parfois la frontière s’efface, le nom se perd dans l’anonymat de l’exil et de la dissolution. Redonner voix, c’est aussi redonner corps à ce qui s’est perdu et assurer ainsi une sorte de délivrance peut-être à travers le rêve d’un envol furtif au-dessus de la mer.
« Qu’importe l’endroit où nous sommes
Je vais renaître pour nommer la mer
Au pain et à l’eau ce vol nous a été offert
Ce vol
Et non pas l’appartenance »Au cœur même de cette nuit de l’âme surgit parfois une espérance de salut symbolique par le signe qui devient alors passeur de mémoire en hommage aux disparues ainsi ressuscitées l’espace d’une phrase dans un style lapidaire et poignant :
« LES FEMMES ONT LES MAINS BRODEES D’ENCRE
Tissées de fleurs et de croissants de lune dans sa courbure
De trait
Sur les paumes et le visage
Une écriture évoque la volonté hasardeuse de la nuée
Depuis le corps la permanence du signe parle :
Je suis l’oiseau
Passager éternel du vol »A travers ce que la poétesse nomme des « cadavres textuels » surgit la force sans concessions d’une parole qui témoigne sans se dérober et devient ainsi le plus vibrant des hommages à ces oubliées de l’histoire errants à jamais sans sépulture autre que ces quelques mots. Telle Antigone, la lutte passe par ce pouvoir symbolique qui fonde notre humanité, par-delà toute barbarie… Rien ne peut-être définitivement perdu de ce qui fut ainsi transmis par le pouvoir de l’écriture qui devient le linceul éternel de toutes ces femmes, brodé de « fleurs » et de « croissants de lune » : « Indéfiniment l’écriture dans la silhouette d’un monde abandonné. » (Maria Negroni)
Véronique Elfakir