Entretien avec Fabrice Thumerel par Cécile Guivarch
Cher Fabrice Thumerel, Libr-critique est un site essentiellement de chroniques littéraires, mais propose aussi des créations, des entretiens, des vidéos. Vous pourriez nous raconter un peu l’aventure de ce site : comment est donc né ce site de littérature dans tous ses états ?
FT. Tout a commencé par notre rencontre, à Philippe BOISNARD et à moi-même, qui coïncide exactement avec la naissance du web 2.0 (2003) : en un temps hypermoderne où tout va très vite, ça nous semble loin... C’était le moment où le Net bénéficiait d’une entière gratuité et où l’espace des possibles semblait infini ; on parlait plus de cybercafés que de cyberattaques, de cybersécurité ou de cybersurveillance. Peu de sites artistiques ou littéraires : Novarina.com, Poezibao, Remue.net mais pas encore Publie.net...
Philippe était arrivé depuis peu à Arras, chef-lieu du Pas-de-Calais, où il avait fondé l’association « Trame Où Est », au moyen de laquelle il organisait des soirées poétiques et avait pu établir une résidence de poésie contemporaine au centre Noroit (2000). En provenance de la capitale où il avait achevé ses études de philosophie, avant même ses trente ans, il disposait déjà d’un vaste réseau et d’une solide expérience dans les milieux expérimentaux, ayant notamment collaboré à ces revues extraordinaires qu’étaient et sont encore – pour une bonne partie d’entre elles – DOC(K)S, Le Philosophoire, Java, Avis de passage, BoXon, Ec/artS, TIJA (The Incredible Justine’s Adventure), La Femelle du requin, POÉSIE/EXPRESS, Fusées... C’est ainsi que défilaient à Arras – en plus des autres lieux où Philippe organisait ou suivait divers événements – tous ceux qui faisaient bouger les lignes d’une vie dite et prétendue littéraire, mais en fait sclérosée par une restauration qui voulait liquider l’héritage des avant-gardes : Mehdi Belhaj Kacem, Jérôme Bertin, Julien Blaine, Philippe Castellin, Anne-James Chaton, Sylvain Courtoux, Chloé Delaume, Jacques Donguy, Antoine Dufeu, Jean-Michel Espitallier, Christophe Fiat, Jérôme Game, Michel Giroud, Joël Hubaut, Christophe Manon, Charles Pennequin, Emmanuel Rabu, Jacques Sivan, Christophe Tarkos... Ça, c’était de la vie ! C’est une bande déjantée qui participe à la manifestation qu’avait organisée Philippe lors du printemps des poètes en 2001, Généalogi-Z. Avec ses premières créations textuelles (Dégoût en corps en 2000, K (or) T(or tu(r)& en 2002) et surtout de vidéopoésie ou de poésie visuelle (Poetik-politik-koncept et Data_History_X en 2004, puis les schémas cognitifs de War-z et les montages de Petites annonces), Philippe voulait prolonger le travail des avant-gardes tout en se revendiquant du postmoderne : grand écart, si l’on peut dire, entre TXT et Java...
À partir de 2003, je vois naître les duos que forment Philippe Boisnard et sa compagne d’alors, Hortense Gauthier (Agence_Konflict_SysTM, HP-process), et j’assiste au lancement de Talkie_Walkie, revue multimodale, multipolaire et multimatérique, laquelle se range parmi les revues postmodernes qui, anti-élitistes, revendiquent une culture pop... Je suis stupéfait par ce qu’arrive à créer Philippe à partir de langages informatiques, l’investissement total que ça nécessite... À cette époque, il s’attaque également à la création de sites : c’est d’ailleurs essentiellement pour x-tr-m-art.com qu’il reçoit en 2007 le prix de la SDGL. C’est un autre monde qui se présente à moi ! Moi dont le parcours depuis les années 90 (critique littéraire dans des revues diverses + recherche en littérature-philosophie-sociologie) explique l’orientation : très imprégné par les œuvres de Sartre et de Bourdieu (en juin 2000, j’ai du reste coordonné une journée d’étude Sartre / Bourdieu à la Sorbonne), je suis un fervent défenseur de la pensée critique sous toutes ses formes, ayant publié un livre-somme sur la critique qui a connu un certain succès (Armand Colin, 1998) et un plus gros volume intitulé Le Champ littéraire français au XXe siècle. Éléments pour une sociologie de la littérature (Armand Colin, 2002). Mais, grâce à Philippe, je découvre de l’intérieur un espace poétique que je ne connais pas bien encore, ce qui va stimuler ma propre pratique entreprise sous pseudonyme. Les points de convergence entre nous sautent tout de suite aux yeux : l’héritage des avant-gardes et de la pensée critique, et en particulier l’admiration vouée à l’œuvre de Christian Prigent puis à celle de Bernard Desportes, que nous avons découverte presque en même temps (d’où le volume qui lui sera consacré en 2008, que j’ai dirigé à Artois Presses Université) – et ce malgré le fait que le directeur de Ralentir travaux (1995-2000) soit un Moderne très critique vis-à-vis des avant-gardes.
C’est dans ce contexte que, entre 2003 et 2005, nous prenons conscience de nos complémentarités et élaborons peu à peu l’architecture du site – qui démarre véritablement en 2006 (peu de posts en 2004 et 2005) – avant de réunir une petite équipe. On y retrouve les rubriques que vous indiquez (chroniques / créations / vidéos / entretiens), qui suivent les lignes de fuite émergeantes : place à la « postpoésie », notion déjà historique qui peut englober toutes les formes remettant en question la conception traditionnelle de la poésie (poésie sonore / sonique, poésie visuelle, poésie concrète, poésie action, documents poétiques...), mais également à toute création fictive ou tout discours théorique qui revêt une dimension (auto)réflexive, interroge l’histoire des genres comme les conditions de sa propre possibilité, propose une critique des représentations socioculturelles dominantes. La littérature dans tous ses états, c’est celle qui sort de ses gonds, se nourrit de ses interactions avec les autres sciences humaines (philosophie, sociologie, histoire), avec les arts plastiques et visuels, les arts du spectacle et du numérique, les langages informatiques...
Libr-critique a donc été créé pour combler un manque : celui d’un no man’s land libre & critique qui, en tant que lieu d’édition et de réception, défende les pensées atypiques et les écritures exigeantes. Autrement dit, Libr-critique doit sa raison d’être au vide laissé par la critique journalistique comme par la critique universitaire. Annexée par la logique et la logistique commerciales, la première se borne le plus souvent au seul faire-vendre, ignorant les productions du pôle de circulation restreinte, pratiquant l’amalgame ou défendant des produits interlopes, et devenant de plus en plus insignifiante, ne serait-ce que par la réduction de l’espace attribué dans un état du champ où la littérature est une valeur en chute libre. Quant à la seconde, bien qu’elle se soit considérablement développée et transformée, elle relève encore d’une temporalité différée, fait encore globalement prévaloir le savoir sur le savoir-faire et se révèle encore en partie affectée par cette double postulation : soit elle peine à opérer le passage des valeurs sûres de la littérature classique et moderne aux contemporains qui s’efforcent de s’extraire du système normatif pour construire l’horizon à venir, se réfugiant alors dans l’indifférence ou des postures conservatrices ; soit, pour s’être convertie trop rapidement à la littérature en train de se faire, elle tombe dans ces travers de prosélytes que sont l’enthousiasme naïf et le ralliement spontané aux valeurs dominantes, ou retombe dans un conservatisme endémique tendant à privilégier les œuvres lisibles.
Dans ces conditions, Libr-critique a pour vocation de mettre au service de la littérature actuelle, non seulement les savoirs les plus variés possibles (universitaires ou non), mais encore de véritables « manières de critiquer » (formule de Francis Marcoin avec qui j’ai lancé en 2001 la collection du même nom aux Presses de l’Artois). Ce qui revient à combler le déficit propre au double système critique en place par le fait même de combiner savoir et savoir-faire, actuel (chroniques approfondies sur les nouvelles parutions) et inactuel (dossiers et articles de recherche sur des problématiques plus générales, transhistoriques).
Je terminerai, pour ne pas être trop long, par un survol express de l’évolution. Les premières années, nous publions 200 à 250 posts par an, et assez rapidement nous dépassons les 20 000 vues par mois (avec un record à 25 000 visiteurs uniques environ par mois). Une première refonte, avec des modifications visibles, est réalisée par Philippe en 2013. C’est bien entendu Philippe qui a pris en charge les chartes graphiques successives, et c’est grâce à ses compétences en informatique que Libr-critique ne ressemble à aucun autre site. Pour ma part, depuis 2013 j’assure une grande partie des mises en ligne et assure la communication.
Le titre « Libr-critique », il dit beaucoup, il est sobre au final. Mais comment s’est-il imposé ?
FT. Il s’est imposé comme allant de soi : Philippe et moi voulions insister sur la liberté et sur la dimension critique, tout en reprenant une pratique avant-gardiste (la suppression d’une lettre, le « e » de « libre »)... L’extrême mobilité du morphème « Libr- », sa polyvalence nous arrangeait bien : « Libr-créations », « Libr-lecteurs », « Libr-@ction », etc.
Aussi, avec Libr-critique , on s’attend à de la critique complètement libre, positive ou négative. Faut-il bien l’entendre ainsi et pourquoi ?
FT. Tandis que certains prétendent offrir des « critiques libres » tout en demeurant dans la spontanéité irréfléchie et en prônant des valeurs marchandes, on peut revenir rapidement sur la mutation qu’a introduite dans le champ pratique des internautes la collusion au sein du label choisi entre les champs sémantiques de « libr(e) » et de « critique ». Pour décrire synthétiquement les pratiques des internautes, y compris dans la sphère culturelle, on peut s’appuyer sur la trilogie conceptuelle : liberté-immédiateté-gratuité. Sur la Toile, le sentiment de liberté explique la prédominance d’un discours spontané qui prend la forme d’écritures-exutoires (journal intime – que cette invention technologique permet d’illustrer facilement -, poésie sentimentale et naïve – pour reprendre la terminologie de Jean-Claude Pinson –, divanitations diverses…) ou de réactions épidermiques (commentaires « à chaud », polémiques, etc.). Quant à l’immédiateté, elle a souvent pour corollaire la facilité. Car la migration vers le web s’effectue avant tout au plan pragmatique, qu’il s’agisse de mettre en ligne des informations, de courtes chroniques, des documents écrits, sonores ou visuels (à consulter et/ou à télécharger). Il n’est évidemment pas question ici de nier l’intérêt de la libre circulation des savoirs (fonction didactique), mais plutôt de constater que, dans les domaines intellectuels et artistiques priment les fonctions de divertissement et de thérapie (expressions spontanées) ou les seules fonctions informative et documentaire. Cette relation immédiate à un medium de l’immédiateté s’accompagne en outre d’un sentiment de gratuité, au sens économique, certes, mais aussi philosophique : le flux numérique nuit à la densité doxique, au poids éthique et ontologique des prises de position ; autrement dit, sur le web, la quantité et la célérité des échanges favorisent la superficialité, le désengagement, voire l’irresponsabilité. Cette logique des flux permet de comprendre pourquoi l’espace des blogs répertoriés comme « littéraires » – labellisation qui, à elle seule, est un complexe objet d’étude sociogénétique – est en fin de compte régi par une puissance homogénéisante.
Le postulat en germe dans le label « Libr-critique » : il ne saurait y avoir de liberté sans médiation réflexive (sans réflexion ni réflexivité, donc) ; de projet créatif sans négativité critique. De sorte que les principales rubriques sont consacrées à des travaux très élaborés, qu’ils relèvent de la critique, de la recherche (universitaire ou non), ou encore de la création textuelle ou numérique ; qu’est requis l’engagement pleinement assumé de tous les auteurs ; que les membres de la rédaction sont censés prendre la distance critique nécessaire à toutes leurs prises de position, y compris dans les espaces réservés aux commentaires.
Comment ça se passe maintenant ? Vous recevez des livres en service de presse il me semble, mais vous avez aussi différents rédacteurs. Votre site est-il alimenté au fur et à mesure ou avec des périodicités ? Acceptez-vous toutes les propositions envoyées ou bien avez vous des exigences particulières et lesquelles ? Cela revient à dire : comment fonctionnez-vous ?
FT. La littérature dans tous ses états, c’est aussi sous toutes ses formes : nous recevons beaucoup de livres, certes, mais également des fichiers MP3 ou MP4 et des liens qui sont autant d’invitations à visiter d’autres sites, d’autres univers numériques.
Récusant systématisme, univocité et unidimensionnalité, Libr-critique crée un espace structuré selon le principe du blog – alimenté au fur et à mesure selon un rythme mensuel moyen de 15 à 20 posts – et dont le mode de fonctionnement est décentralisé : non seulement les membres de la rédaction sont libres de leurs contributions, mais encore et surtout le chantier collectif qu’offre le site suit les lignes de fuite que constituent les projets et propositions d’intervenants extérieurs, les diverses manifestations auxquelles nous sommes invités, les works in progress… Aussi peut-on parler d’espace dialogique ou d’espace communicationnel (Habermas). La seule limite que nous posons aux intervenants extérieurs : ne pas aller à l’encontre des postulats évoqués dans les réponses précédentes. Concernant les livres reçus, notre seul refus concerne les formes usées, qu’elles soient « traditionnelles » ou « modernes », voire « postmodernes » : Libr-critique n’est pas un simple inventaire de textes et de créations diverses ; son objectif n’est pas de mettre à disposition et de présenter des produits qui correspondent à l’éventail des goûts actuels – n’est ni d’être éclectique, ni de prétendre à l’exhaustivité. Cette restriction n’est pas sans conséquence, puisque, de fait, elle élimine la majeure partie des œuvres produites – publiées ou à publier. Elle présuppose bien évidemment de notre part un jugement motivé : c’est en fonction de notre expérience, de nos savoirs et compétences que nous estimons caduques certaines formes-sens. D’où cette question : Dans un monde anomique, en quoi peut bien consister la valeur littéraire ? Par valeur littéraire, j’entends, non pas la totalisation des qualités intrinsèques de l’œuvre, mais le jugement qualitatif que portent légitimement sur les productions et les positions les seuls acteurs spécifiques du champ (critiques et écrivains principalement), qui, en mettant à distance la doxa, en fonction de leurs seules dispositions et compétences, examinent dans quelle mesure telle ou telle posture modifie l’espace littéraire contemporain – c’est-à-dire la production auctoriale et éditoriale, la réception critique et publique -, voire se prononcent sur l’innovation formelle, éthologique ou conceptuelle de telle ou telle œuvre.
Contre les flux entropiques, Libr-critique est ainsi un lieu multipolaire – et non pas groupusculaire comme à l’époque des dernières avant-gardes – dont l’objectif est, tout en se gardant de l’éclectisme et en veillant à l’équilibre entre endogène et exogène, de faire circuler des objets formels et conceptuels, de produire des réactions polynucléaires, des interactions épiphaniques… On le voit, au moyen d’un mode de libre circulation, il s’agit d’éviter l’institutionnalisation qui guette toute revue, du moins à un moment donné : sa périodicité, sa reconnaissance, le fonctionnement de son comité de rédaction, ou encore le poids symbolique de ses membres, sont autant de facteurs qui la font souvent tomber dans une logique d’appareil, la transformant en machine factuelle et hégémonique (une fois réifiée sa finalité – esthétique, philosophique, etc. –, elle devient un objet sans objectif, objet commercial donc).
À une époque de restauration littéraire, dans le prolongement de toutes les initiatives qui, depuis la Belle Époque, proposent des alternatives au circuit de production commercial – des revues artisanales aux revues en ligne, en passant par le Mail Art -, Libr-critique résulte de la volonté d’opposer des machines désirantes et pensantes à la machinerie consumériste qui cancérise tous les mondes habitables, y compris l’univers culturel, la forte énergie dissolvante à la force d’inertie pétrifiante (le moléculaire au molaire, pour le dire à la façon de Deleuze et Guattari), les résistances vivisonnantes et centrifuges aux puissances homogénéisantes et centripètes.
Quels sont les livres, les auteurs que vous défendez plus particulièrement ? (dans le style, la forme, les propos, etc.) Ou bien vous ne préférez pas défendre untel ou untel mais vous préférez vous laisser porter par le courant ?
FT. Libr-critique est un lieu alternatif interdisciplinaire qui est ouvert, indépendamment de toute chapelle et de toute mode, à toute contribution inédite aux plans formel et thématique. C’est dire que, même si nous sommes sensibles à la modernité carnavalesque et aux formes nouvelles que nous a apportées le dernier demi-siècle (en particulier dans les domaines des créations sonores, visuelles et multimédia), nous n’avons pas d’a priori.
C’est justement parce que nous nous inscrivons dans l’économie des biens symboliques que, dans un état du champ où, d’une part, la saturation du réseau entraîne l’invisibilité et l’éphémérité des œuvres non formatées, et d’autre part, la culture de la gratuité est devenue majoritaire, faire connaître (dimension économique) et reconnaître (dimension symbolique) une œuvre sont les deux aspects indissociables d’une même lutte en faveur d’une conception de la littérature fondée sur la valeur. Précisons que, si nous sommes l’un des rares lieux à recenser de nombreux ouvrages publiés par ceux que l’on nomme les « petits éditeurs » – conformément au postulat selon lequel la valeur des œuvres n’est en rien proportionnelle à la surface médiaticommerciale de son lieu d’édition –, inversement, nous ne nous interdisons pas d’écrire sur des textes lancés par des lieux économiquement importants (filiales de grands groupes, « grands éditeurs »).
Voici donc les principes : ne souhaitant pas me lancer dans un name dropping qu’il faudrait motiver – ce qui pourrait et devrait, en bonne méthode, remplir un volume entier –, je vous renvoie, vos lecteurs et vous-même, à la découverte des nombreuses œuvres que nous défendons, emportés par un courant comme qui dirait « électrique »...
Il y a les livres chroniqués, critiqués, mais il y a aussi des créations, des vidéos. Vous nous en parlez un peu plus ?
FT. Dès le début, et c’est ce qui nous différencie d’autres sites, afin de prendre en compte la spécificité de notre medium, nous avons souhaité accorder une place non négligeable à l’ouïvoir des créations et même à ce que peut avoir de vivant un entretien filmé. Philippe avait même mis en ligne des soirées entières à DATABAZ, et aussi des festivals (EXPOÉSIE, MUZZIX, MANIFESTEN...). Mais les fichiers vidéo sont lourds, et ont donc un coût : plus il nous faut d’espace, et plus grossit la facture d’OVH – ce qui nous amène d’ailleurs à la question des moyens financiers.
Vous venez de construire un nouveau site. C’est du temps tout cela, de la patience pour tout remettre au bon format, pour que ce soit attrayant pour les internautes. Quels moyens disposez-vous pour cela ?
FT. Œuvrant dans l’espace de circulation restreinte, nous sommes habitués à bosser « pour l’amour de l’art »... Nous n’attendons évidemment aucun autre bénéfice que symbolique. Cela dit, il nous faut régulièrement trouver quelques moyens financiers : pour notre lancement, nous avons bénéficié d’une subvention de l’université d’Arras, dans la mesure où nous avons mis en ligne des colloques ; depuis, nous réinvestissons une partie de l’argent perçu pour nos activités.
Quelle est votre ambition pour ce nouveau site, allez-vous proposer des évolutions, de nouvelles rubriques, ou bien est-ce une continuité et/ou une urgence technique qui vous a conduit à migrer le site sur une nouvelle plateforme ?
FT. En effet, notre nouveau site, déjà parfaitement répertorié par les moteurs de recherche (http://t-pas-net.com/librCritN/), a été lancé fin avril en raison d’une urgence technique (à cause d’un bug, l’ancien, qui coexiste pour l’instant avec le nouveau, ne nous est plus accessible). Mis à part quelques modifications visibles, il reste pareil à lui-même, c’est-à-dire ouvert à l’aventure et susceptible de surprendre.
Plus que jamais, LIBR-CRITIQUE s’érige à l’encontre de ces sept virus capitaux que sont l’éclectisme, le consumérisme / promotionnalisme, les conservatismes politiques et institutionnels, le patrimonialisme, le cuculturalisme, le suivisme, le tiédisme et l’irénisme : plus que jamais il s’agit de viser une radicalité qui, sans rapport avec un extrémisme ou un militantisme quelconque, a trait aux recherches formelles et réflexives sur les questions traitées ; contre la littérature des « situations moyennes » (Sartre), contre l’imposture de la poslittérature ou de la postcritique qui se pose comme dissensuelle pour mieux rejoindre les valeurs consensuelles du demi-monde littéraire, notre voie est l’irreprésentable / l’innommable et notre état d’esprit est la mise en crise de nos idées sur la vie sociale et littéraire pour adhérer un peu plus à cette nouvelle vie qu’impose une civilisation en sursis. LIBR-CRITIQUE est, non pas dans le « post- » antimoderne, mais dans le faire, et dans un faire impétueux qui ouvre les possibles.
Un grand merci Fabrice Thumerel
libr-critique
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